On aura peut-être remarqué que ce blog adopte des thèmes parfois différents, avec trois (et bien vagues) peut-être qui surnagent, outre la Suède : l’art (notamment peinture et sculpture), une certaine littérature d’après-guerre (et notamment André Dhôtel), une partie de l’histoire concentrationnaire (autour d’Elmar Krusman, des camps annexes du Kl Natzweiler).
NB - Automne 2024 |
Les croisements de thèmes peuvent amener à quelques surprises. Des hasards non abolis par des coups de touches. Mais des touches…
On a dépassé les mille jours de guerre en Ukraine, mille jours donc que l’agression russe sur son voisin a eu lieu. C’est à peu près le nombre de jours d’existence de ce petit blog aussi.
NB - automne 2024 |
Et ne peut-on considérer – hasard, hasard ? – que cette attaque russe a coïncidé avec une prise de conscience étendue – même si elle n’a pas eu autant de conséquences qu’on voudrait – du fait que l’on est entré dans un temps où les énergies fossiles reculeront. La guerre russe est en lien aussi avec cette évolution : moins consommer de pétrole et gaz russes – ne plus en consommer du tout à terme ? – impose bien sûr d’accélérer ce qu’on appelle assez laidement la « transition énergétique ». Et il n’y aura pas de miracle, ça passera par une transition économique, d’abord une « stagcroissance » puis une décroissance – intelligente si possible…
Ça se cabre ici et là : l’autruche Trump avec son antivaccin Kennedy issu d’on ne sait plus quel monde, un Chris Wright, présenté comme un héraut de la fracturation hydraulique, annoncé comme ministre de l’énergie de l’ancien-futur président américain… un coup de téléphone récemment (15 ou 16 novembre) du chancelier allemand à Poutine… car l’Allemagne subit de plein fouet les transitions actuelles.
On pourrait parler ici aussi d’autres transitions, évolutions… migrations… entre pays autant qu’entre époques.
Yves Lepesqueur, dans un livre assez fantastique dont on reparlera – aux éditions de l’Harmattan, ça ne surprendra personne – n’évoque peut-être pas des croisements ; l’auteur parle lui de paradoxes. On y évoque par exemple Taha Husayn, que j’évoquai quant à moi dans un petit article de La Route inconnue, à propos… d’André Dhôtel… Bref, lui, Yves Lepesqueur, écrit à propos des migrations pages 83-84 : « Le migrant est devenu une figure de légende comme l’étaient autrefois le chevalier ou le moine. Ce nouveau statut s’est traduit par cette nouvelle appellation : on ne parle plus d’émigrés ou d’émigrants, plus d’immigrés ou d’immigrants : seulement de « migrants », autant dire de migrateurs.
(...)
La disparition des préfixes a une signification très claire : les deux préfixes de l’é-migré et de l’im-migré faisaient référence à ses deux pays. Tout immigré était un émigré, il avait deux pays, celui où il était né et celui où il mourrait peut-être (…)
« Migrants », « mobilité des cadres », « mobilité internationale des étudiants », « formation tout au long de la vie », « flexibilité », etc. sont des termes qui ressortissent au même « champ sémantique », comme disent les cuistres, celui du changement, du mouvement, de l’instabilité, autant dire celui du Bien. »
Mais Modiano… Migrations dans le temps. Il apparaît le même jour, le 16 novembre dernier, dans les blogs de Patrick Bléron (Alluvions, en lien de ce blog-ci, en haut, à droite…) et de Thomas Nydahl, qui fait la recension d’une nouvelle traduite en suédois, Seine.
« Paris, 1940-tal. Berättarjaget är en blyg artonåring som går en kurs på en teaterskola.
Yre kvällar i veckan är det »gruppövning». Det är när stjärnan på kursen, kamraterna emellan kallad »grevinnan», har vunnit första pris i drama i den årliga tävlingen, som han får syn på en liten flicka som sover i en av de röda sammetsfåtöljerna längst bak i salen. Hon visar sig vara dotter till »grevinnan» som gett henne smeknamnet Lilla smycket.
Långt senare är det Lilla smycket själv som är berättaren i den roman av Patrick Modiano som bär hennes namn. »
« Paris, années quarante. Le narrateur est un jeune homme timide, dix-huit ans, suivant des cours de théâtre.
Trois soirs dans la semaine, ce sont des « exercices de groupe ». Quand la star du groupe, que ses camarades surnomment entre eux « la comtesse », remporte le premier prix dramatique au concours annuel, il remarque une petite fille endormie dans un des fauteuils de velours rouge tout au fond de la salle. Elle se révèle être la fille de la comtesse, qui l’a surnommée La Petite Bijou.
Bien plus tard, la Petite Bijou devient elle-même le personnage phare d’un roman de Patrick Modiano. »
Bon, mais sait-on que Modiano fait partie de ces gens qui n’ignorent pas André Dhôtel ? Encore un autre sujet.
Nils Blanchard