mardi 5 décembre 2023

Neige / tristes langages / Vit och svart

On passe du noir au blanc ; enfer ou paradis pour les uns, inversement pour les autres. Du coup pour illustration et sans grand lien au sujet, j’ai retrouvé cette photo de Paris. Je ne saurais dire, à l’instant, quand je l’ai prise. Peu importe.

NB

Des jours passés ont été un bombardement d’ignominie importée de Fricland : le rush du black
friday… Au moins un ministre, en France, discrètement peut-être, a-t-il été à l’encontre d’une certaine doxa à ce sujet, dans son gouvernement même vraisemblablement. Dans un article du Figaro du 14 novembre dernier (de Jérémy Pennors) – puis il y a eu une campagne d’information qui a fait jaser… –, Christophe Béchu de dénoncer le récit du Black Friday, « qui vante un modèle de surconsommation insoutenable (…) Je rêve d’un Green Friday où le récit de la sobriété, de la réparation, du réemploi serait mis à l’honneur comme contre-modèle de société. »

Dans le Göteborgs Posten, un article de Jonathan Andersson (le 28 novembre) narre l’histoire d’un vendeur du magazine Faktum, journal de sans-abris :

« Den mångårige Faktum-försäljaren står utanför Systembolagets lokaler i Nordstan. Fredag har bytts mot måndag och affärerna går marginellt bättre. Två försäljningar har gjorts under dagen – en till en gammal bekant och en till en äldre man. 
Fredagen, som hade lovat så mycket med både Black Friday och löning, var en annan historia. »

« Le vendeur de Faktum, avec derrière lui ses années d’expérience, se tient devant la boutique du Systembolag à Nordstan. On est lundi, vendredi est passé, et les affaires vont un tout petit peu mieux. Il a pu faire deux ventes dans la journée : une à un habitué, une à un homme assez âgé.
Vendredi, qui promettait tant (Black Friday et jour de paie), ça a été une autre histoire. »

En gros, ce vendredi noir, il n’a rien vendu.
(Nordstan est une grande galerie (couverte donc) au centre de Göteborg, contenant boutiques, restaurants, accès aux gares…
Le Systembolag est la chaîne monopolisant la vente de l’alcool en Suède, contrôlée par l’État.)

NB - Alsace

Dieu sait que je ne suis pas opposé à la culture anglo-saxonne – anglaise, américaine… mais on peut légitimement subodorer que l’usage incontrôlé, la frénésie, voire l’incontinence de l’usage (avec l’accent français plîîîîseuh) de termes anglais, soit la marque d’un relâchement intellectuel.
Ainsi des publicités pour attirer des candidats aux concours de professeurs, récemment en France, lâchant comme une trouvaille le mot « challenge »…

Dans un article encore de novembre (le 30 novembre) de Krickelins, l'auteure du blog d’écrire :

« Jag vaknar, ligger och skruvar mig, går upp och kissar och försöker sedan blunda igen. Det är svårt. Jag tänker på mina listor och leveranser. Sedan tänker jag på träning. Därefter tänker jag på att jag inte får bli sjuk och på att alla runt om som är sjuka. Hur ska jag värja mig?
Räknar på fingrarna. Hur många timmars sömn har jag fått egentligen?
Klockan är fem när jag ger upp, stiger upp ur sängen, dra på varm tröja och smyger nerför trappan mot dagens första kaffe. Utanför kör plogbilen. Fram och tillbaka. Fram och tillbaka. Ännu mer snö. (…) »

« Je me réveille, reste encore un peu au lit, nerveuse, me lève, vais faire pipi, essaie de fermer les yeux à nouveau. Ce n’est pas facile ; je pense à mes listes, mes livraisons. Puis je songe à faire du sport. Puis je me dis qu’il ne faut pas que je tombe malade avec tous les gens malades autour.
Comment vais-je m’en préserver ?
Je compte sur mes doigts : combien d’heures de sommeil, réellement ?
Il est cinq heures, je me lève, sors du lit et mets un pull chaud, vais doucement en bas prendre le premier café du jour. Dehors le chasse-neige. Qui va, qui vient. Qui revient. Toujours plus de neige. »

Ça, c’est dans le Bohuslän. Thomas Nydahl évoque aussi à peu près au même moment la neige en Scanie, qu’il juge « infernale » (parce qu’il est âgé et malade).

Et même en Alsace où c’est devenu si rare, il y a eu un petit tapis de blanc.

Mais voyez comme on retombe sur ses pattes : elle se lève à cinq heures. Vous y avez pensé, n’est-ce pas ? Il est cinq heures, Paris…


Nils Blanchard

samedi 2 décembre 2023

À Stockholm, à Gammalsvenskby / ici ailleurs

Un des intérêts (ou… l’intérêt?) d’internet est d’avoir accès, bien sûr, facilement à des nouvelles, des réclames, presque des quotidiens (pas les journaux spécialement ; les gens ne les lisent plus paraît-il) du monde entier.

 

En l’occurrence, via les liens de ce blog, on tombe sur une réclame (sur le site de la SOV) pour une journée au musée de l’histoire de la marine, à Stockholm, consacrée aux pays baltes, via un partage culturel sur le thème de Noël. C’est ce 2 décembre…

On entre dans décembre bien sûr ; besoin d’un peu de scintillements rêveurs pour se réconforter face au  froid qui s’installe, à l’obscurité… En France, qui plus est, les 2 décembre sont de fichue mémoire.

Bon, mais à Stockholm, l’hiver, le Mälar est vaguement pris dans les glaces, dans lesquelles les lumières s’en donnent à cœur joie. Il y a une étrange sensation d’espace, de possible.

NB - Stockholm en hiver

On a accès – je reviens à internet – aussi à des événements moins sereins, pour le moins. Le site en lien de ce blog, récemment ajouté, « Föreningen Svenskbyborna » (sur Gammalsvenskby), fait régulièrement le point sur la situation face à la guerre, dans ce village d’origine esto-suédoise dont on a déjà plusieurs fois parlé en ce blog. Là (on est près de Kherson), on a connu des jours meilleurs. Un rapport du 22 novembre dernier, de Sofia Hoas, s’intitulait : « Värsta dagen någonsin » / « Le pire jour jusqu’à présent ». Le 25 novembre, on lisait (toujours de Sofia Hoas) :

« Rapport från Gammalsvenskby.
Vädret är nu kallare i byn och det har kommit lite snö. Ryska armén fortsätter sina terrorbombningar med artilleri, tunga glidbomber och drönare. Senaste dagarna har även brandbomber använts, som gjort att bostadshus har brunnit ner.
(...) »

« Rapport de Gammalsvenskby.
Le temps est plus froid maintenant et il a neigé un peu. L’armée russe poursuit ses bombardements de terreur via l’artillerie, des planeurs et des drones. Ces derniers jours, il y a eu aussi des bombes explosives, qui ont entraîné des incendies de maisons.
(...) »

Gammalsvenskby était une survivance, à l’histoire mouvementée (ce « retour » d’une partie de la population en Suède, puis la décision d’une partie d’entre eux de repartir vers l’Ukraine…)
Gammalsvenskby, évidemment, aujourd’hui, c’est une fenêtre vers cette autre réalité, celle de cette guerre.

Le 28 novembre, c’est la maison communale qui a été mise en miettes par un bombardement.

Quoi qu’il en soit, derrière cette autre réalité de la guerre, des guerres, pointe, souvent, la situation des minorités, plus ou moins acceptées, plus ou moins intégrées peut-être, plus ou moins fantasmées. (Je ne parle pas là de « wokisme »...) La première de ces minorités est la juive bien sûr. Je l’avais en tête – cela apparaît un peu dans mon livre – quand je travaillais sur l’histoire des Esto-Suédois pour présenter l’environnement d’Elmar Krusman.

Et je suis retombé sur un article (relativement) ancien de Thomas Nydahl, du 31 octobre 2022) ; il est introduit par cette citation d’Imre Kertész, traduit par Ervin Rosenberg :

« Jag lever i en frivilligt vald och accepterad minoritetssituation, jag skulle lika gärna kunna kalla den: världsminoritetssituation, och om jag ville ge en mer exakt definition av denna minoritetssituation skulle jag inte använda rasmässiga eller etniska begrepp och inte heller religiösa eller språkliga. Min accepterade minoritetssituation skulle jag definiera som en andlig livsform som har sin grund i den negativa erfarenheten. »

« Je vis dans une situation minoritaire volontairement choisie et acceptée ; je pourrais l’appeler aussi bien : situation de minorité au monde. Et si je voulais en donner une définition plus exacte, je n’utiliserais pas des notions de race ou d’ethnie, pas plus que de religion ou de langue. Ma situation minoritaire acceptée, je la définirais comme un mode de vie et de pensée ayant ses racines dans l’expérience négative. »

On en reparlera, vraisemblablement.
Bon, mais pour en revenir à ma modeste personne, j’ai ressenti çà et là par le passé quelque chose qui approche peut-être de la « situation minoritaire », mais elle n’avait pas de racine négative. Au contraire, dans un sens, cela partait de voyage, d’imprégnation dans divers pays, Finlande, États-Unis, Suède principalement, voire Allemagne, Royaume-Uni ; çà et là en France tout aussi bien.
Je faisais partie de la minorité des voyageurs, des gens qui se posent à un endroit sans savoir nécessairement combien de temps va durer leur séjour, qui envisagent, vaguement, plus ou moins précisément parfois en fonction de rencontres, d’amours, de s’installer plus longuement.

Et dans un sens, je n’ai jamais vraiment posé mes valises.

NB - Stockholm en hiver


Nils Blanchard


Triche : J'évoquai Henrik Ibsen, L'ennemi du peuple au dernier post-scriptum, mais que je ne pus placer dans les étiquettes. Aussi: André Dhôtel, Jean-Claude Pirotte.

lundi 27 novembre 2023

Des requins aux bains de mer / Peintres suédois

Je reprends le fil de billets déjà (...) un peu anciens.  Icilà...
Quant aux bains de mer, on y revient, toujours avec Kristin Lagerkvist qui en parle régulièrement dans son blog, à toutes saisons… Ou avec deux autres blogs d’intérêt récemment découverts : Julia Eriksson et Ulrika Nettelblad – en som skriver.

Gerda Roosval-Kallstenius - Capture d'écran

La première écrit le 7 novembre, au début d’un long article intitulé : « Novembers djupa andetag » – « La profonde inspiration de novembre » :

« Kalendern visar november. Årets elfte månad, den långa och gråa, men också det djupa andetaget innan. Före högtider och glitter, decembers hysteri.
(...)
En fördel med det stilla, gråa är det ännu inte blivit för kallt för att ses på bryggan på onsdagsmorgnarna för ett dopp. Kylan biter förvisso hårdare och stunden i vattnet blir kortare, men ruset efteråt finns fortfarande där. När kroppen skjutsar runt blodet och det liksom pirrar i bröstkorgen av energi och extas. »

« Novembre au calendrier. Le onzième mois, long et gris, mais aussi la profonde inspiration avant la suite. Avant les fêtes et les lumières, l’hystérie de décembre.
(...)
Un avantage avec ce calme, ce gris, est qu’il ne fait pas encore trop froid pour qu’on ne puisse se retrouver au ponton les mercredis matins pour un petit plongeon. Il fait froid cependant et le bain en est raccourci, mais l’ivresse, après, est bien là. Quand le corps propulse le sang en lui et qu’il y a comme ce picotement dans la cage thoracique – énergie et extase. »

Anders Zorn - Capture d'écran

Cela est entremêlé de photos de Stockholm, du bain, où je retrouve mes lumières et ambiances de cette ville – à l’époque, Anne-Marie Berglund vivait toujours (souvent à Stockholm) et je l’ignorais totalement (on en reparlera…) J’avais d’autres chats à fouetter il est vrai.

Plus loin, elle affiche sa lecture d’Isabelle Ståhl (qui faillit remporter le prix du journal de Borås en 2018 ; et Wera von Essen l’a remporté en 2019…), un roman intitulé Eden. Or j’ai eu beaucoup affaire à la notion de paradis au cours de recherches et lectures récentes ; quelque chose qui me poursuit, sur quoi je n’arrive pas à mettre précisément le doigt.

Birger Simonson (école des coloristes de Göteborg) - Capture d'écran

La seconde écrit d’Åland – photos en noir et blanc ; textes prisés ; et on en reparlera… ; dans un article du 27 septembre, on lit :

« En septemberkväll packar vi (…), åker till stranden och har vårt lördagsmys där. Det är indiansommar. Kvällen är ljum, men den kommer att svalna snart. Snart skymmer det. Vi simmar i havet. Säsongens sista bad. Jag har känt obehag för kallt vatten så länge nu, trots att jag förr älskade att bada. Som om stress och sorg tunnat ut huden. Som om minsta obehag, minsta motstånd inte gått att genomleva för belöningen som kommer strax därefter.
Men nu simmar jag mot vågorna, det doftar salt mot mitt ansikte, jag sänker mig under ytan, allt är svalt. »

« Un après-midi de septembre, on a fait nos sacs (…), puis on est allé à la plage pour notre détente du samedi. C’est l’été indien. La soirée est douce, mais il va bientôt faire plus frais. La nuit va commencer de tomber. Nous nageons dans la mer. Le dernier bain de la saison. Ça fait si longtemps que je n’aime plus l’eau froide, lors que j’adorais autrefois me baigner. Impression que le stress, la peine, s’exhalent de la peau. Comme si le moindre désagrément, la moindre contrariété ne pourraient survivre à la récompense, juste après.
Or maintenant je nage vers les vagues ; ça sent le sel sur mon visage ; je me laisse aller en profondeur, tout est fraîcheur. »

Fraîcheur, froid… Mais en même temps, quel plaisir d’entrer dans l’eau d’huile, noire d’un fjord et rencontrer quelque pingouin, plongeon… (je n’ai pu déterminer, cette fois-là, l’espèce exacte). Entrer comme en un autre monde, comme entrer dans une autre lumière.

Ivar Kamke - Capture d'écran

Henri Thomas – que l’on rerouve bien sûr dans l’article de Bernard Baillaud sur 84, dans La Revue des revues – avait un grand goût pour les bains de mer. Cela se passait en Corse, en Bretagne… Il y avait les bains de sa « vie  réelle », ceux de ses romans. Ainsi dans La vie ensemble (Gallimard, 1945), il se baigne à plusieurs reprises – enfin, Souvrault – et notamment du côté de Porquerolles, vers la fin de ce roman riche et étrange ; une sorte de Paris-Méditerranée de guerre, sans guerre, ou…

Pendant l’Occupation, il fut privé de plage par le blocage des côtes par les Allemands. Se souvenait-on de ce genre de détail ? Où le diable se glisse…
Et voilà : retour à l’enfer ; du coup, retour au paradis.


Nils Blanchard


P..-S. : - Je parlais de feuilleton sur France Culture. En ce moment : Un ennemi du peuple, d’Ibsen.
C'est le soir à 20h30, en semaine.

- En lien de lien de ce blog, via Alluvions, le site de Jérôme Leroy: Feu sur le quartier général... Là, un très court texte, avec une photographie qui parlera aux promeneurs... Il y est question, entre autres, d'André Dhôtel, Jean-Claude Pirotte... Que demande le peuple?

jeudi 23 novembre 2023

Autres maisons / lectures

Ce titre est peut-être mal choisi, tant il est vrai que pour parler d’« autres maisons », il faudrait commencer par habiter une première. Ce n’est pas mon cas.


 En revanche, des maisons « secondaires » plus ou moins accessibles, ou des lieux plus généralement : il y a là un sujet quasiment infini. (Voir aussi ceci.)
Avec cette étrange loi qui les rend inaccessibles (du fait d’emplois du temps professionnels, parfois en lien avec des gens médiocres avec lesquels on voudrait justement prendre un peu de distance), au moment où on aspire beaucoup à y être.


C'est ce que rend très bien le billet de Kristin Lagerqvist du 19 novembre 2023. De belles photos montrent une maison du sud de la France au décor intemporel et étrangement ordinaire (on n’a pas le kitch d’une demeure de Suédois super-ikea au milieu des oliviers et entourée d’une piscine…) Non, un petit jardin, des fenêtres qui donnent sur des maisons en face où l’on devine des gens relativement ordinaires
Et il y a la lumière (ça ne peut être seulement les photos), la trace de vacances passées, de lectures même, peut-être, dont on devine les effluves s’échappant de piles de volumes çà et là.

Souvenir soudain de lectures de Simenon, dans une de ces maisons.
Lectures de Mankell, de Nabokov aussi, dans une autre.


Hasard qui fait bien les choses ; un passage en revue des couvertures de Simenon en suédois, sur le net, montre beaucoup de maisons, en ville, à la campagne.
Là : « Maigret et la fille en colère » ; titre original : Félicie est là. Je ne crois pas avoir lu celui-ci.

En l’occurrence, c’est moi qui ne décolère pas ; je parlais de gens médiocres… À ce que j’évoquais au dernier billet des petites misères de K, il faut rajouter presque une enquête du Château par jour, auxquelles on incite fortement les professeurs à répondre… Enquêtes… anonymes ! Alors, là, pardon, mais je vais me permettre d’être ici un peu familier. Aux gens qui demandent à des adultes, responsables, de donner un avis (quelque soit le sujet) sans le signer, je me propose de leur renvoyer ladite bafouille en version suppositoire.

Quant à l’anonymat, je préfère de loin celui de Paris – en soi un peu une vaste maison (même si les charges en sont de plus en plus élevées).
Balcon : les Quais ; chambre à coucher : le Luxembourg. Et cetera.
Discussion de chambrée : avec des inconnus dans la file d’attente d’un cinéma du quartier latin ou du boulevard Montparnasse.



Quant aux Inconnus dans la maison...   


Nils Blanchard


Triche : Je rajoute des étiquettes trop nombreuses pour le précédent billet : Octave Mirbeau, August Strindberg, Carl Zachrison, Florence Gould, Suède, Norvège.

samedi 18 novembre 2023

Trois points, plus ou moins en rapport avec la justice

Trois points sur des actualités ou parution récentes. Pour le deuxième, aussi, autour du KL Natzweiler et du bourreau Ehrmanntraut – qu’Elmar Krusman côtoie d’après un témoignage très singulier (voir mon petit livre).
Pas de lien à faire (hormis ce thème de la justice) entre les trois points.
 
Karl Hoffer, Sybille - capture d'écran

¤ Michel Ciment, disparu très récemment, avait fait une mise au point très juste sur une certaine chasse aux sorcières, qui piétine (et s’en vante parfois) la présomption d’innocence qui est pourtant une des bases de toute bonne justice et, derrière, de l’état de droit.
 C'était dans l’émission de France inter « Le Masque et la plume », de Jérôme Garcin, le 24 septembre 2023 :
 

« Moi, ça me gêne beaucoup, ces enquêtes, pseudo-enquêtes, sans preuve véritable, sans jugement (…) J’attends que la justice donne un verdict après une enquête approfondie. (…) Je suis gêné par cette chasse aux sorcières. »

 

Karl Hofer, Mutter und Tochter - capture d'écran

¤ Deuxième point : il y a sur le site de l’ancien camp du Struthof (site au titre étrange : « Mémorial Struthof »…) des documents fort intéressants, régulièrement publiés notamment dans une chronique « L’archive du mois ».

(Appris incidemment par ailleurs que Michaël Landolt, dont il est question notamment ici et , a été nommé récemment à la tête du CERD (Centre européen du Résistant Déporté).)

Le document commenté en ce mois de novembre est la déposition du déporté NN Roger Leroy en mars 1949, pour le procès de Metz.

Il y est question du traitement effroyable du kommando de NN français, chargés de faire des travaux de gros œuvre de ce qu’on appellera la « cave à pommes de terre », sous la direction de Franz Ehrmanntraut.

« Par tous ses aspects, la Kartoffelkeller est devenue le symbole de l’oppression, de l’épuisement, de l’avilissement des déportés par le travail et les coups ; de la volonté ultime des nazis d’anéantir toute résistance et tout espoir. »

Karl Hofer, Les prisonniers, 1933 - Capture d'écran

Maintenant, on me demandera ce que vient faire Karl Hofer en ce billet ?

J'ai simplement découvert très récemment ce peintre, allemand (1978-1955), proche des expressionnistes, considéré comme « dégénéré » sous le régime nazi.

¤ Troisième point, que je ne développerai pas beaucoup car il n’a pas grand intérêt : eu maille à partir à nouveau avec le Château. Notamment, voilà K mis en cause ; on l’accuse (sans l’accuser directement bien sûr – c’est pourquoi je dis que ce sujet a un intérêt limité : la sous-klamminette locale à qui j’ai affaire semblant par trop médiocre) d’avoir simulé la maladie pour manquer une journée de travail. (Est-il besoin de signaler que K est très rarement absent?)

Mais le lien avec la justice, plus exactement avec le droit, est le brouillard de règlements qui lévite autour de la sous-klamminette en question, à donner le tournis. Sans doute pourrait-on en trouver, de ces règlements, qui iraient dans le sens des arguments de K (si K, bien sûr, les avait développés ; il a préféré sortir son portefeuille, cela prenant bien moins de temps ; K se ressent toujours d’un gros rhume, et il a bien autre chose à faire que d’aller farfouiller là-dedans. Et que de discuter avec une sous-klamminette).


Nils Blanchard


P.-S.: – Ajout. Je suis un peu de mauvaise humeur en fignolant ce billet, pour diverses raisons – on le voit avec ce qui précède. Bon, mais m’agace aussi le fait d’avoir loupé une conférence qui m’aurait vraisemblablement intéressé : « Déporté à Obernai ? », de Sandrine Gaume, le 30 octobre à Obernai. Je n’en avais nulle part vu mention, avant de la voir – on était déjà en novembre – sur le site internet de l’ancien camp du Struthof que je consulte pourtant régulièrement.

Il a été consacré trois billets en ce blog à ce camp. (Cliquer dans les mots clé, à droite, version ordinateur...)


– Lien à l’article précédent. Dans cette édition de La faim, de Knut Hamsun (Archipoche, 2023), il y a un avant-propos d’Octave Mirbeau, de 1895 (date de naissance de mon grand-père, de Florence Gould…) O. Mirbeau n’aime pas Strindberg, mais défend Hamsun ; à l’époque, la Norvège était liée encore à la Suède.

L'avant-propos est suivi d'une courte « préface » d'André Gide. Elle, date de 1950; elle a été publiée d'abord dans le numéro 15 de... la revue 84

Détail d'E. Munch en illustration


mercredi 15 novembre 2023

Indifférence ?

Étrange titre que celui que donne Bernard Baillaud à son texte sur 84, dans La revue des revues n° 70, de septembre 2023 : « 84, revue indifférente ».


La notion d’indifférence me mène d’emblée à une chanson de Charlélie Couture : « indifférence ». C’est dans l’album Victoria Spirit, de 1991 :

« Elle écoutait la pluie tomber au fond du puits de sa mémoire, elle jouait son dernier rôle celui de la statue qui s’affole ; ses yeux un peu perdus, sentiments confondus
(...)
Hey je suis venu près de toi / me protéger tu vois / je n’ai pas peur de la fée qui danse autour de toi / celle qu’on appelle : Indifférence
(...)
je voulais te dire / tout le mal que peut faire / la fée qui danse autour de toi / celle qu’on appelle : Indifférence. »




L'indifférence est à double-tranchant, puis « tout est relatif » pourra-t-on dire.
Une notion sur laquelle on reviendra sans doute.
Mais j’attendais avec une certaine impatience ce numéro de la Revue des revues : Bernard Baillaud avait annoncé en effet qu’il reviendrait sur le sujet de 84, alors qu’il avait évoqué le Cahier André Dhôtel n° 19, 84, Vie et littérature ; on a déjà parlé de cela aussi.

Qui plus est, indifférente aux étiquettes, La revue des revues, s’intéressant à toute sorte de revues, annonçait dans son sommaire, entre autres, après l’article sur 84, un texte de Harri Veivo : « La géopolitique des avant-gardes et l’objectivité de la revue. Exemples nordiques. »
Là, pour le compte, on s’approche de la thématique centrale de ce blog, et il est étrange (pp. 85-86) de voir se succéder, d’une page à l’autre, la dernière page du dernier numéro de 84 (clôturant bien sûr l’article de B. Baillaud) et une illustration du numéro 1 de la revue suédoise Spektrum (1931).
Cette image, du reste, a quelque chose d’inquiétant ; on y voit un joli quartier de petits immeubles remplacé par des barres assez sinistres… On songe vaguement à ces nouveaux quartiers de Kungälv (et d’ailleurs) qui dévorent la vi(e)/lle.
On pourrait évoquer certains anciens quartiers soviétiques de Tallinn, où je déambulai vaguement sur des traces d’Elmar Krusman.

Voyez vous-mêmes :


Ill. Spektrum La Revue des revues, n° 70, p. 86.

NB - Tallinn

Harri Veivo est un universitaire ; il enseigne les études nordiques à l’Université de Caen Normandie. Ça nous fait un lien, même si de mon côté c’est très fragile et provisoire. Il est probable en effet que je ne devienne pas un universitaire, parce que je n’arrive pas à « prioriser » un centre d’intérêt ; ce blog le montre suffisamment !


Nils Blanchard

lundi 13 novembre 2023

Concomitances, III ; 1923, Laclos, cinéma de l’Est

On a parlé de 1921, 1922, 23… Là, 1923 : le tableau ci-dessous est de cette année-là. Comment arrive-t-il (elle) en ce blog ? C’est que Henri Lebasque est né à Champigné, où je suis passé très récemment.

Henri Lebasque, Nu exotique, 1923 - Capture d'écran

Et… On se souvient que Champigné – un château de Champigné – est le lieu d’origine du héros de Messalina, de Hillevi Norburg, dont le blog Stasimon est en lien de celui-ci et dont il a été question par là....

Et… Il y avait ces soirs passés sur France culture une lecture très bonne d’un des plus beaux textes de la langue française, Les liaisons dangereuses. Or il se trouve qu’on en parla aussi, vaguement en lien à Hillevi Norburg.

Lundi 6 novembre dernier, lecture notamment de la lettre XCVI de Valmont à la marquise de Merteuil, concernant Cécile de Volanges. 
Ce tableau-ci ?

Henri Lebasque, Femme endormie - Capture d'écran

Dans l’un des billets évoqués plus haut, j’évoquai un village (français) à partir d’un autre (suédois) ; apparaissaient en parallèle des allusions aux Liaisons dangereuses… en lien un peu improbable à un article du blog Gabi annex (en lien de celui-ci).

Hasard complet ? Mais têtu, alors. 
Toujours dans ce blog Gabis Annex (de Gabrielle Björnstrandt), il y a quelque temps (près d’un an, cependant) a paru un article sur le cinéma tchécoslovaque.
Et là, mention d’un film, que je vis quand il sortit en France : Mon cher petit village, de Jiří Menzel, dont j’ai gardé un bon souvenir.

Le mur n’était pas encore tombé à cette époque (autour de 1985). L’Est caparaçonné de soviétisme fournissait (ou avait fourni) çà et là des cinéastes parmi les plus talentueux du temps. (En Pologne aussi, Kiéslowski, Polanski…)
Parmi les Tchèques, aussi : Milos Forman. Là (mais dans sa période occidentale), on retombe naturellement aux Liaisons dangereuses.

« Hermia Says », blog en sommeil depuis quatre ou cinq ans d’une bibliothécaire de Gävle, que j’évoquai incidemment ici, a consacré en 2013 un article à des représentations cinématographiques et théâtrales des Liaisons dangereusesFarliga förbindelser, représentation qu’on trouve jusque dans le cinéma sud-coréen de Je-Yong Lee.



Nils Blanchard

Neige / tristes langages / Vit och svart

On passe du noir au blanc ; enfer ou paradis pour les uns, inversement pour les autres. Du coup pour illustration et sans grand lien au suje...