mercredi 29 janvier 2025

Fantômes / Premiers jours de janvier

Au fond les fantômes, spectres, ne sont pas très loin des anges. Messagers, que l’on croit faire sens au milieu de choses qui reflètent un certain chaos ?

NB - janvier 2025

Promenade au hasard dans l’un des premiers jours de l’année désert, rues d’Angers, autour de l’Université catholique, de mes anciens collèges. Itinéraires du passé, sans grand changement, si ce n’est l’université en question, où je pris quelques cours de japonais autrefois, accumule les nouveaux bâtiments.
Précisément, tout semble comme en suspens.

NB - janvier 2025

Lumière angevine dans une rue dont je ne sais plus le nom. Croisé des jeunes femmes – réelles, pas celle de l’affiche – transportant on ne sait quel barda. Il doit y avoir quelque centre d’accueil, quelque part au milieu des maisons bourgeoises.
Par là, un fronton, un haut de porte ? – comment appelle-t-on cela ? – que je n’avais jamais remarqué, peut-être ajouté plus récemment… « Plus récemment », qu’est-ce que cela veut dire ? Quelques années ? Quelques décennies ? Le temps semble autre.

NB - janvier 2025

Que représente cette scène, du reste ? Un viol ? Une scène de ménage ?
Plus loin, on entre dans la rue Bressigny ; un bar-club, déjà fermé, que je n’avais jamais remarqué ; il n’a pas dû faire long feu.

NB - janvier 2025

On bifurque vers le petit parc d’Ollone, anciennement attaché aux Beaux-Arts. Restaurant associatif africain. Lui non plus, je ne l’avais pas remarqué auparavant.

NB - janvier 2025


NB - janvier 2025


Puis d’anciens remparts affleurent.
Époques qui se mêlent. La mienne ? Ai-je eu vraiment une époque ici ? Je me souviens d’une fille dénudée à l’arrière d’une voiture.
Fantôme ; moi-même ?

En cette ville…

Gunnar Ekelöf (Non serviam) : « Jag är en främling i detta land
men detta land är ingen främling i mig!
Jag är inte hemma i detta land
men detta land beter sig som hemma i mig! »

« Je suis un étranger en ce pays
mais lui, lui ne l'est pas en moi !
Je ne suis pas chez moi en ce pays
or il se comporte comme chez lui en moi ! »

Alors Ingrid Bergman, bien sûr, dans un film de son homonyme. Edith Södergran
Villon !

NB - janvier 2025


On arrive, vers la rue de Brissac, devant une maison dotée d’une horloge sans aiguilles ; voyez-vous ça. Bergman encore, Les fraises sauvages.

Différents âges, différents temps, différents pays… Que veulent dire les fantômes ?


Nils Blanchard


P.-S.: – Après l’épisode de Notre-Dame payante, nos édiles qui confondent culture et tiroir caisse voudraient rendre le Louvre plus cher pour les étrangers (hors U.E.).
C'est oublier que les œuvres du Louvre ne sont pas seulement une attraction nationale, mais qu’elles sont proprement universelles (elles viennent d’Egypte, d’Angleterre, d’Italie, de France…) Que la culture est échange, partage, ouverture au monde, et pas seulement pin-code…
(Du reste, ne pourrait-on ici reprendre la citation d’Ekelöf?)
Puis que « verra » l’« étranger » que l’on plumera, en allant au Louvre ? À peine un cent millième des œuvres qui y sont présentes.
Ne vaudrait-il pas mieux réduire un peu l’« offre » – pour reprendre leur vocabulaire – et distribuer davantage d’œuvres de ce trésor inter.national (vous ne me verrez pas souvent utiliser l’écriture « inclusive »… profitez-en!) aux musées provinciaux ? Par là-même, dévier un peu de ce « flux » touristique (ils voudraient douze millions de visiteurs par an!) dans d’autres villes de notre pays ?


– Puisqu’il est question de fantômes, et d’expositions, même de femme nue, dans cette série de billets, il en est une (exposition) qui est bien alléchante, à Liège !

vendredi 24 janvier 2025

Tidö, France (mais aussi États-Unis) - 2

Comme promis, retour sur les étranges expériences de gouvernements soutenus par l’extrême droite, sans que celle-ci daigne avoir de ministres, en Suède et en France.

Farliga förbindelser, Natur & kultur, à paraître en mai 2025 (traduction de Jan Henrik Swahn)


En Suède, le gouvernement d’Ulf Kristersson est au pouvoir depuis le 18 octobre 2022.
On ne va pas faire ici un historique complet des entrelacements politiques qui ont conduit à ce gouvernement. Notons simplement que cette coalition de droite et extrême droite de Tidö fait suite aux résultats des élections législatives du 11 septembre 2022. Les sociaux démocrates (sortants, d’un gouvernement de coalition fragile) sont arrivés largement en tête avec 30,33 % (et 107 sièges). Les trois partis de droite et centre-droite (qui s’étaient déjà entendus par le passé pour gouverner), avec 19,10 % (68 sièges modérés, de Kristersson), 5,34 % (19 sièges chrétiens-démocrates) et 4,61 % (16 sièges libéraux) avaient donc moins de voix, à eux trois, que les sociaux-démocrates.
Mais Ulf Kristersson, qui avait déjà essayé, sans succès, de former un gouvernement quatre ans plus tôt, avait décidé de rompre le « cordon sanitaire » autour de l’extrême droite (« Démocrates de Suède » – ceux-là, à 20,54 % et 73 sièges) pour prendre le pouvoir (le nombre total de sièges étant de 349).
Donc, le 14 octobre, les accords de Tidö sont annoncés, accords de gouvernement incluant les Démocrates de Suède aux décisions programmatiques sans que ceux-ci participent au gouvernement. (Tous les membres des trois partis lestés de l’extrême droite n’ont pas accepté la chose ; le gouvernement de Kristersson a été investi par le Parlement (Riksdag) avec 176 voix contre 173…)

(Cette manière d’inclure l’extrême droite aux décisions sans qu’elle participe au gouvernement peut rappeler, peut-être, la posture entre deux chaises de la Suède pendant la Seconde Guerre mondiale.)

Ces accords sont censés être remis en cause tous les ans ; ceci étant, les Démocrates de Suède du parlement apportent donc leur soutien, décisif, aux décisions du gouvernement au Parlement.

Les représentants des 4 partis de Tidö; Wikipedia


Un article de Wikipedia sur ces accords note qu’ils sont divisés en 7 parties (croissance et économie, criminalité, migrations et intégration, climat et énergie, santé publique, éducation, démocratie et culture). Bon, on s’amusera peut-être à voir cela plus en détail ; ce n’est pas le propos du moment. Disons pour résumer, et faire écho à la vulgarité des temps, qu’on a là une forme de trumpisme (très?) light (parler de « trumpisme » est un peu rapide ; Tidö reste implanté dans une tradition nord-européenne, très difficilement comparable à l’orage imprévisible trumpien (on y garde un souci du droit des femmes, le respect des accords de Paris sur le climat… on n’y attaque pas les minorités de genre – y pense-t-on seulement ? –…)

Ce gouvernement a toujours cours aujourd’hui ; les prochaines élections devraient avoir lieu en 2026.

D'après Marguerite Gérard, illustration des Liaisons dangereuses, édition de 1796

En France, le malheureux (et très habile négociateur, nous a-t-on répété) Michel Barnier a été premier ministre avec l’accord tacite (il n’y a pas eu d’après ce qu’on sait de compromis, de contrat officiel) de Mme Le Pen. Cela a duré du 5 septembre au 13 décembre 2024, peu de temps donc vu que Mme Le Pen a soudainement baissé le pouce. Cela me fait un peu penser à cette fable, que je trouve très politique : Le scorpion et la grenouille. Elle a des origines lointaines, diverses sans doute, mais dans sa forme scorpion-grenouille, elle viendrait (Wikipedia encore) du romancier russe Lev Nitoburg (assassiné en 1937 pour activité "contre-révolutionnaire"…) Ah, et elle apparaîtrait dans le roman Le quartier allemand, de 1933.
(Le « C’est dans ma nature » du scorpion peut faire penser au « Ce n’est pas ma faute » de Valmont, dans Les liaisons dangereuses, bien que ce dernier me semble autrement moins antipathique.)

Dans un cas, un gouvernement est au pouvoir depuis plus de deux ans ; dans un autre il a tenu un peu plus de trois mois.

La suite, à un prochain billet... 


Nils Blanchard


Et puis… – Mort de Bertrand Blier, peu après celle de David Lynch. Pourrait-on sortir aujourd’hui un film comme Les valseuses ?


Triche… J’ajoute l’étiquette « Alluvions », du précédent billet.


dimanche 19 janvier 2025

Fantômes, Le Sidaner

Problèmes d’yeux, aussi, qui expliquent peut-être une certaine frilosité, et toutes ces expositions que j’ai manquées. Nouvelle visite, du reste, au « NHC » (nouvel hôpital civil, à Strasbourg), où j’ai dit bonjour en passant au copain du garçon au poisson de ce blog.

NB - Strasbourg

Erratum, néanmoins, j’ai vu que l’exposition sur l’archéologie des camps, au Laténium, en Suisse, était prolongée jusqu’au printemps.




Bon, mais il était question dans cet article du 8 janvier du peintre Henri Le Sidaner, et du nom, que l’on retrouve ; il y a ainsi le poète Jean-Marie Le Sidaner. Lui a d’abord été professeur de philosophie dans les Ardennes (à l’instar d’un Emmanuel Peillet, dont il a été question en ce blog, dans certaines de mes recherches…) Il est l’auteur de L’effet de neige, Leçons d’apocalypse, La Mort…

Puis il y a un écrivain, romancier, biographe… Louis Le Sidaner.
On ne trouve nulle notice Wikipedia ou autre sur internet à son propos. Par contre, des livres peuvent être achetés à des libraires et sites de vente. Je ne l’ai pas encore fait ; j’en reparlerai donc… peut-être.
Mais puisqu’il était question de fantômes, on peut mentionner le début d’un de ses romans, Le commencement de la fin :

« Je suis mort hier soir, à vingt-trois heures quinze. [La mort, décidément.]
La chose s’est produite très rapidement. Je rentrais chez moi et, après avoir sonné, attendais que mon concierge tirât le cordon, lorsque, tout à coup, j’ai senti qu’une masse dure me frappait le crâne, violemment. »

On verra si on trouve le livre pour en parler plus avant…



De Jean-Marie Le Sidaner, on trouve trois poèmes sur le site « Wikipoèmes ».
Par exemple, Métamorphoses :

« Un jeune homme un matin se réveille dans le corps d'un vieillard. A l'inverse, une vieille femme se découvre adolescente dans son miroir et sort de l'hospice sous les regards d'enfants qui viennent à peine d'acquérir le corps robuste d'hommes mûrs.

L'esprit s'habitue mal. L'amoureux d'hier, vieilli, implore son amante redevenue gamine, tandis que la vieille femme métamorphosée en jeune fille juge ses efforts et ses émois sans avenir.

Un fait demeure : le trépas. Au moins personne n'ose plus formuler ces commentaires : « Il était trop jeune pour mourir », ou : « Il a fait son temps. » »

Retour à Louis Le Sidaner ; Paul Léautaud lui écrit le 7 janvier 1948, il n’y a après tout que soixante-dix-sept ans – et c’était aux temps où il fréquentait les déjeuners de Florence Gould (Correspondance 2, J’ai lu, p. 1135) :

« Vous êtes toujours charmant pour mes petits travaux (…)
Je pense que vous devez être le fils du peintre Le Sidaner, de qui j’ai vu souvent des œuvres, dans ma jeunesse, quand je visitais des expositions de peintures, ou des galeries de marchands de tableaux. »

Voilà qui me fait un point commun avec Paul Léautaud. Dans ma jeunesse…
Et, oui, c’était sans doute le fils du peintre ; on a ce portrait (d’Henri Le Sidaner).

Henri Le Sidaner, Portrait de Louis Le Sidaner, enfant - Capture d'écran


Pour ce qui est d’Henri Le Sidaner, son jardin se visite à Gerberoy. Il y a là un autre enfant goûtant les créatures maritimes, un dauphin cette fois, réplique de Verrocchio.

Andrea Verrocchio, L'enfant au dauphin - Wikipedia


Nils Blanchard


Aussi : mort de David Lynch. Dans le blog « Alluvions » (en lien de celui-ci, etc.), Patrick Bléron a titré son article « Les fantômes de la mélancolie et du rêve ».
Et de noter (proprement en note…), que David Lynch avait « 78 ans, autrement dit le même âge que Donald Trump. (… ) L’un disparaît alors même que l’autre s’apprête à être investi dans la fonction présidentielle. »

mercredi 15 janvier 2025

Tidö, France - 1

Je n’ai pas « regardé » ces dernières années les « Questions au gouvernement » à l’Assemblée nationale, sur LCP ; ce : pour diverses raisons, notamment des questions de temps.
Mais j’ai « regardé » le discours de politique générale de François Bayrou le 14 janvier. (C’est peut-être son bayrou-d d’honneur – pardon… –, mais il cite Marc Sangnier, Jaurès…)


Hugo Simberg - Capture d'écran


Même si j’y étais préparé (je ne suis pas un ermite…), j’ai été passablement atterré par les cris continuels venant notamment de l’extrême gauche de l’hémicycle.
Aussi, comment ne pas être surpris par la violence des réactions les représentants des extrême droite et gauche ? Les deux vouent aux gémonies le malheureux premier ministre, sans rien proposer de sérieux en retour (on pense avec une certaine jalousie aux « cabinets fantômes » britanniques – puisqu’on était dans le sujet des fantômes, qui émanent d’oppositions qui travaillent). Est-ce travailler que se dandiner sur une estrade, lire plus ou moins bien des textes il est vrai assez bien torchés, en sachant pertinemment qu’on ne viendra pas tout de suite au pouvoir ?

Au passage, les représentants du Rassemblement national et de la France insoumise semblent totalement ignorants du fait que la Russie, il y a bientôt trois ans, a attaqué l’Ukraine, et que cette guerre continue aujourd’hui…

Hugo Simberg - Capture d'écran


J'ai le projet depuis quelque temps de comparer dans un billet les gouvernements Barnier (en France, soutenu – le brave homme – par l’extrême droite) et celui de Kristersson (en Suède, soutenu par l’extrême droite aussi). Force est de constater que l’expérience suédoise est plus durable ; pourquoi ? C’est ce que je tâcherai d’étudier…

Mais cette tension, ces cris incessants et stupides, qu’on entendait lors de ces questions au gouvernement du 13 janvier m’ont rappelé – lointainement – la situation de l’Allemagne à la fin des années vingt et au début des années trente. Le nazisme a alors finalement pris le pouvoir, mais n’oublions pas que la République de Weimar (très proche, dans ses institutions, de notre Vème République, ou de la République finlandaise d’alors) a été affaiblie aussi par l’extrême gauche. (Il est vrai que les communistes allemands pouvaient alors difficilement passer l’éponge sur la répression insensée des spartakistes…) Aux élections législatives de novembre 1932, les « partis de gouvernement » (mettons qu’on puisse entendre par là ceux qui étaient prêts à rendre le pouvoir pacifiquement après l’avoir exercé un certain temps), ont obtenu (source, Wikipedia ; SPD : 20,43 % + Zentrum : 11,93 % + peut-être le DNVP (Parti populaire national allemand) : 8,34 + le BVP (Parti populaire bavarois) : 3,09 + différents autres petits partis (6,66%)) 50,55 %.
Tout le reste, soit près de la majorité, revenait au parti nazi (33,09%) et au parti communiste (16,86 %). Ah, et il ne faut pas oublier les bons vieux abstentionnistes (près de 20%).

Hugo Simberg - Capture d'écran


Quant aux illustrations de ce billet, elle émanent du peintre Hugo Simberg (1873 – 1917, d’origine suédophone), antérieur on le voit à la période évoquée ; n’ayant pas même connu la Finlande indépendante. La Finlande était alors un grand-duché passablement autonome de la Russie ; Hugo Simberg avait pu voyager en Angleterre, en France, en Italie… Il était de Vyborg que les Soviétiques prendront à l’issue de la Seconde Guerre mondiale.


Nils Blanchard

samedi 11 janvier 2025

En Suède aussi pourtant il y a des moutons, 2


Agda Holst, capture d'écran


Une étude britannique du média scientifique en ligne BMC, publiée le 9 décembre 2024, confirme, avec un peu plus de recul donc, ce que l’on disait alors. L’étude porte sur treize pays européens (Belgique, Danemark, France, Allemagne, Italie, Irlande, Pays-Bas, Norvège, Portugal, Espagne, Suède, Suisse, Royaume-Uni).
Elle prend en compte les principales phases de l’épidémie (première : janvier-juin 2020, deuxième : juillet 2020-juin 2021, troisième : juillet 2021-juin 2022), semble prudente et bien menée. Elle est accessible ici.


Agda Holst, capture d'écran


Dans les grandes lignes, l’étude intègre d’abord ses calculs de surmortalité pour les différents pays à leur mortalité entre 2010 et 2022 (pages 5-6 de la version PDF), ce qui donne une idée de l’impact de la pandémie sur les populations, sur un temps plus long.

À partir de là (page 7), elle explore les évolutions de la surmortalité des divers pays (janvier 2020 à juillet 2022) par diverses tranches d’âge, sur la durée des trois phases.
Là, la Suède se situe systématiquement parmi les pays les moins impactés.

C'est pendant la première période que la Suède a la surmortalité la plus importante (+ 0,55 environ, pour mille), largement plus alors que le Danemark et la Norvège avec qui on l’a beaucoup comparée (à tort), eux (comme l’Allemagne) n’ayant alors pas de surmortalité, la pandémie n’y ayant alors pas (ou très peu et ayant été contrôlée en Allemagne) entraîné de foyers déclencheurs. (Page 8.)

À la fin de la deuxième phase, la Suède est toujours au-dessus de la Norvège et du Danemark, mais a rejoint un groupe (avec l’Irlande) de pays moins atteints que les autres par la surmortalité.

À la fin de la troisième phase, la Suède est… isolée, très nettement en dessous des douze autres pays (à environ 0,15 de surmortalité), le pays le plus proche étant alors l’Espagne à 0,4. Danemark et Norvège sont alors parmi les trois pays les plus impactés, au-dessus de 0,8.

CQFD.

Agda Holst, capture d'écran


En ces temps où en France en tout cas, on entend à nouveau parler d’hôpitaux saturés du fait d’une épidémie de grippe, on peut méditer sur d’indécrottables œillères de certaines gens. Souvenons-nous des propos d’un représentant de l’Union des entreprises de proximité, cité dans le Figaro, 8 octobre 2024), expliquer qu’il « faut freiner [les arrêts maladie] de deux ou trois jours qui perturbent les petites entreprises et encourager les gens à ne pas s’arrêter chaque fois qu’ils ont un petit rhume ».

On a évoqué déjà, il n’y a pas si longtemps, cette idéologie du « marche ou crève », obtuse et bête.


Nils Blanchard


Triche : je rajoute ici l’étiquette « Jean-Marie Le Sidaner » que je n’ai pas eu la place de mettre au précédent billet.

Et puis... - Joe Biden, le 10 janvier à propos des incendies de Los Angeles : « There is a global warming. (...) Climate change is real. (...) We have the capacity to response to it, if we exercise our good judgment. »
« Good judgment », « le bons sens ». Mais ce n’est pas le bon sens qui semble prendre le pouvoir en ce moment dans beaucoup de pays.

- L'excellent site de Bernard Umbrecht, Le Saute Rhin, en lien indirect (il faut passer par Alluvions) de celui-ci, mentionne le 11 janvier que les universités allemandes quittent un « réseau » « social » bien connu : « Plus de 60 établissements d’enseignement supérieur et de recherche parmi les plus importants d’Allemagne et un autrichien ont choisi d’annoncer ensemble leur volonté commune d’interrompre leurs activités sur la plateforme X (anciennement Twitter).
Ce retrait est justifié par le constat d’une incompatibilité entre les orientations actuelles de la plate-forme et les valeurs fondamentales de l’enseignement supérieur que sont l’ ouverture sur le monde, l’intégrité scientifique, la transparence et le débat démocratique. »

Je suis toujours atterré quand je vois un personnage officiel de notre continent, président de la République ou autre, s’exprimer sur ce genre de « média ».

NB

mercredi 8 janvier 2025

Fantômes, ratages d’expositions

Étranges jours un peu opaques (météo) dans l’Ouest de la France. Pour diverses raisons, j’ai loupé plusieurs expositions. Du coup, impressions parfois, fantomatiques, de passer à côté de gens, d’événements qui me concernent, sans les voir réellement, ou inversement de me frotter à trop de possibles – devenant impossibles. C’est un peu aussi le sort de ce blog.

NB - décembre 2024


Évidemment, on peut imaginer que les fantômes passent parfois de bons moments, à pouvoir pénétrer en des lieux difficiles d’accès, comme un vestiaire de danseuses. La peinture nous y mène presque aussi bien cependant.

Zinaïda Serebriacova, ballerines - Capture d'écran


Justement, première exposition ratée : celle sur Zinaïda Serebriacova (se terminant le 8 janvier 2025) au Centre spirituel et culturel orthodoxe russe. Bon, là, j’ai une excuse plus solide que pour d’autres ratages : ce n’est pas un ratage. Aucune envie en ce moment d’aller dans un centre culturel russe, pour des raisons que tout un chacun comprendra très aisément.
C'est dommage.

Zinaïda Serebriacova Bath House, 1913, Wikipedia


Du reste, une partie de son histoire, d’il y a à peu près cents, peut faire étrangement écho à nos temps (Wikipedia) :

« She did not want to switch to the Suprematist or Constructivist styles popular in the art of the early Soviet period, nor paint portraits of commissars, but she found some work at the Kharkov Archaeological Museum (…) After the October Revolution, inhabitants of private apartments were forced to share them with additional inhabitants, but Serebriakova was lucky – she was quartered with artists from the moscow Art Thatre. (…) »

Ayant reçu une rande commande, elle part pour Paris en 1924, souhaite ensuite rentrer en URSS – ce n’est pas toujours une bonne idée ; voyez ce qui est arrivé à Navalny – mais ne le peut finalement pas. Elle parvient à ramener auprès d’elle deux de ses quatre enfants, mais restera longtemps séparée des deux autres…



Moins pardonnable, mon incapacité à me rendre à deux expositions, guère éloignées l’une de l’autre, mais difficiles d’accès pour moi au dernier moment. Évidemment, j’aurais dû anticiper, y aller beaucoup plus tôt ; cet été par exemple, ou cet automne. J’ai bien quelques petites – ou grandes – excuses, mais…



Il y a eu cette exposition sur les peintres néo (post?) impressionnistes Henri Martin et Henri Le Sidaner, au Palais Lumière à Evian.
Il se trouve que j’ai eu quelque proximité, familiale, avec les peintures de ces deux artistes ; et il se trouve qui plus est que je les aime bien.

(Bon. Mais ayant en tête cette notion de fantôme, je retrouve un article, de Serge Bourjea, sur la page d’accueil de mon ordinateur, où il est question de « Fantômes de Rimbaud ». On y reviendra peut-être. Là, citation du poème Outre Harar, de Michel Butor : « (…) Frère au très loin je tourne / depuis des années sournoisement / autour de ton ombre gardée / farouchement par des spécialistes / dont tu aurais détesté la plupart (…) » Cela s’adresse à Rimbaud bien sûr ; ah, les querelles de Charleville !
Mais l’idée est que la trace – la culture ? Je résume en citant la conclusion de l’article… : – est « effacement / remplacement / renaissance (« avatar »), la mort seule lui donnant (« augmentant ») ses pouvoirs. »

Archéologie ?

Bon… mais dans cet article de Serge Bourjea, apparaît un autre Le Sidaner, Jean-Marie (poète).)




L'autre exposition était en Suisse, où j’aurais eu plaisir à retourner, sur les traces des découvertes évoquées – mais ça date déjà un peu – ici.


Nils Blanchard


Et puis… - J’ai eu l’occasion d’entendre les vœux présidentiels. En creux, si je puis dire, j’ai songé aux derniers de François Mitterrand. Il est vrai que j’y avais été aidé par une émission écoutée dans la voiture, sur France culture, sur laquelle je reviendrai vraisemblablement. Il y était question… de fantômes. Quant à Mitterrand : « Là où je serai, je l’écouterai [il évoque son successeur à la présidence] (…) Je crois aux forces de l’esprit et je ne vous quitterai pas. »

- On entend parler ces derniers temps des soutiens qu’Elon Musk apporte aux extrême droites européennes, notamment allemande. Ma foi… il eut un prédécesseur – pas si éloigné dans le temps du départ de Zinaïda Serebriacova pour Paris – en Henry Ford. Une preuve s’il en fallait que richesse et qualité ne sont pas toujours réunies.

samedi 4 janvier 2025

Revenons-en un peu à Martin Fahlén, Roelandt Savery, et la dé-coïncidence

Il y a quelque temps déjà, Patrick Pluen, dhôtelien aguerri, m’a envoyé sur Le tableau de Savery les commentaires transcrits ci-dessous (NB).


Le thème de la dé-coïncidence (développé par François Jullien) s’applique bien, peut donner une grille de lecture, au Tableau de Savery.

L'auteur apparaît en effet fasciné depuis son enfance par ce tableau, au point d’y vivre en quelque sorte : Si mes parents se mettaient à parler français, alors je me retrouvais dans la partie sombre de la peinture […] S’il était joyeux, j’étais alors avec les hérons qui s’élevaient vers les nues. (p.7) ; et plus loin : Le tableau, la chambre, le jardin étaient exactement comme des poupées gigognes qui s'emboîtent les unes dans les autres pour ne faire qu’un. (p.75) Il y a adéquation, fusion, coïncidence donc, entre l’auteur, le tableau, la maison…
Le paroxysme de l’adéquation me semble atteint lors de la fabrication du cadre avec son père : encadrer, maîtriser, posséder, délimiter… En même temps, l’auteur cite une phrase du père qui correspond bien au tableau : Ce qui n’est pas légèrement difforme a l’air insensible ; d’où il suit que l’irrégularité, c’est-à-dire l’inattendu, la surprise, l’étonnement sont une partie essentielle et la caractéristique de la beauté. (p.79) Le potentiel de la dé-coïncidence, du descellement est déjà là, mais pas encore intégré par l’auteur ?



Le tableau est près de la perfection, dont les proportions s’approchent du nombre d’or (p.89).
Si le tableau est vendu, la coïncidence subsiste, et le tableau finit par retrouver l’auteur par un hasard inconcevable (p.102). Mais cependant ses animaux ne bougeaient plus, ne me regardaient plus comme autrefois… le tableau était un ami mort. (p.107) Comme le souligne François Jullien, trop d’adéquation mène à la stérilité.
Et survient alors une fissure dans le cadre (p.110-111), le signe d’une séparation, le début d’autre chose en même temps... Je devinai ce qui m’avait empêché d’avancer, et en me libérant… j’allais vers de nouvelles perspectives. L’auteur quitte la fusion, désadhère du tableau, accède à la vie…

Ce en quoi on retrouve ce qu’écrit François Jullien : « De ce qu’une fêlure s’esquisse dans l’ajointement des choses, ou plutôt de ce que cet ajointement attendu, fonctionnel, incidemment se défait, de ce qu’un écart se dessine et, par-là, de ce qu’une adaptation est perdue, une adéquation révolue, quelque chose d’inouï, d’inédit, subrepticement émerge : quelque chose qui n’a pas encore de nom peut commencer de se détacher,  peut commencer de s’extraire de l’indéfini des possibles,  de prendre pied dans l’effectif et d’exister.
Seule une décoïncidence, désolidarisant le soi de cette coïncidence avec soi, peut sauver ce soi promis sinon à l’inertie. Vie du sujet qui, coïncidant avec soi-même comme avec son monde, en suivant le train conforme de sa vie, laisse sa vie s’enliser. »

Version originale du Tableau de Savery.


Patrick Pluen


Triche... - Ajout d’étiquettes du dernier article : Cernay, Julia Eriksson, Helsinki, Finlande.

               - Et très bonne année 2025 !

(NB)

De l’amitié – Montaigne

Pour des raisons plus ou moins sérieuses, plus ou moins éloignées de ma petite personne – ajoutez à cela en assaisonnement telle ou telle pa...