vendredi 31 mai 2024

Mémoire, Brassens… Maine-et-Loire

Un des thèmes d’Elmar Krusman, peut-être pas très remarqué, est celui de la mémoire. Bizarrement, ce thème ressort – bien par hasard – ces derniers temps en lien à Georges Brassens (lui aussi est né en 1921…)

NB - Maine-et-Loire


C'est d’abord ce film de Henri Colpi, Une aussi longue absence, avec un scénario de Colpi, Gérard Jarlot et Marguerite Duras. Un homme – un vagabond – (ré)apparaît, dans une banlieue de Paris (Puteaux) à proximité du café tenu par une dame assez esseulée malgré une aventure avec un camionneur, aidée d’une jeune employée qu’elle traite un peu comme un enfant qu’elle n’a pas eu. L’homme est joué par Georges Wilson, la femme, Thérèse, par Alida Valli.
Elle croit – puis s’en persuade de plus en plus – reconnaître en lui son mari disparu à la fin de la guerre (après être passé notamment par un camp de concentration). Mais il a perdu la mémoire ; n’a de souvenance qu’à partir d’un moment, à la fin de la guerre sans doute, où il s’est retrouvé dans un champ, blessé vraisemblablement.
La femme se montre patiente, entêtée à retrouver son ancien mari, c’est-à-dire à lui faire recouvrer ses souvenirs. Mais on devine à un moment une certaine aporie de la chose. Elle se vexe, se met en colère, n’arrive pas à accepter qu’il ne se souvienne pas d’elle.
Comment appréhender les désordres de la mémoire ?



Le Maine-et-Loire revient sans cesse là-dedans, apparaissant comme une province lointaine de vacance, de France intemporelle. C’est là qu’ils (s’il est bien ce qu’on croit de plus en plus qu’il est) se sont rencontrés avant la guerre, qu’ils passaient leurs vacances. Qu’elle passe elle-même des vacances en compagnie de son camionneur. Elle lui répète plusieurs fois le nom de son pays d’origine. Pour « faire tilt ».
Mais ce qui marchera, bien tristement, bien plus efficacement, ce sont un uniforme et des cris ; une maladroite mise en scène qui mettra l’homme en panique (on crie son vrai nom dans la rue nocturne, lors qu’il fait un détour pour éviter un policier…)

Brassens apparaît vers le début du film, quand Thérèse, qui a suivi le vagabond jusqu’à son repère au bord de l’eau, le regarde déballer des trésors – des images – d’une grande boîte. Parmi eux, une photo de Brassens.

Image (capture d'écran) d'Une aussi longue absence  

Guère de lien entre Brassens et le Maine-et-Loire, si ce n’est ces vers dans la chanson Le modeste :

« Et s’il te traite d’étranger / Que tu vienn’s de Naples, d’Angers / Ou d’ailleurs, remets pas ta veste / Lui quand il t’adopte pardi / Il ne veut pas que ce soit dit / C’est un modeste. »

Mais Brassens d’appparaître çà et là dans de vagues recherches – c’est bien logique – autour de Charles Trenet.
Ailleurs encore.
Récemment, dans une chambre d’hôte au cours d’une marche, un livre dédicacé aux tenanciers, Brassens au quotidien, de Mario Poletti et Nadia Khouri-Dagher, Éditions Au cœur du Monde.

Ou encore il fut question ici d’une exposition sur le temps, qui a cours toujours à Fontevraud (Maine-et-Loire…), où l’on entendait lointainement Saturne.
Voix bizarrement lointaine, lors que Brassens semble insensible au temps.


Nils Blanchard


Rajout : Rajouté Gammmalsvensby et Michel Houellebecq aux étiquettes, de l'article précédent.

dimanche 26 mai 2024

Nils Holgersson ; Autres blogs – Citations et destinations inattendues, et IA (2)

Je reviens à mes citations, destinations inattendues et… mais si, Nils Holgersson…
Dans un autre blog « indirect » d’Alluvions, Le Saute-Rhin, les deux derniers articles portent sur l’« intelligence » artificielle. Enfin, un beau texte en date du 5 mai, dans celui de Julia Eriksson, évoque un séjour au Japon.



Dans le blog Le Saute-Rhin, donc, il est question d’intelligence artificielle, dans deux articles des 5 et 14 avril derniers. Il est évoqué là notamment la transformation d’internet sur les vingt dernières années :

« Depuis une vingtaine d’années maintenant, l’espace médiatique numérique s’est considérablement transformé : créé et développé pour concrétiser des idéaux d’ouverture, de liberté, de partage des savoirs et d’apprentissage collectif, les réseaux sociaux dominants sont aujourd’hui souvent devenus le lieu du cyberharcèlement, de la violence en ligne et de la désinformation. »

Et cela : Anne Alombert (citée par Bernard Umbrecht) le lie à des évolutions somme toute techniques :

Au Web fondé sur le principe des liens hypertextes, qui permet la navigation intentionnelle de sites en sites, se sont peu à peu substitués les algorithmes de recommandations automatiques de contenus, qui téléguident les utilisateurs vers les contenus qui ont suscité le plus d’« engagement » des utilisateursi, sachant que ces contenus sont aussi ceux qui auront le plus de probabilité d’être les plus sensationnels, les plus choquants, voire les plus violents. »



J'ai revu récemment, justement – justement, on va voir pourquoi – un film de Guillaume Nicloux, de 2002, avec Thierry Lhermitte parmi une bordée d’acteurs assez exceptionnels, dont le moindre n’était pas Paris… : Une affaire privée. Je me faisais la réflexion en le voyant que s’il y avait déjà des ordinateurs portables, téléphones de la même sorte (pas de smartphones…), ces instruments ne nous avaient pas avilis au début de ce siècle comme ils l’ont fait aujourd’hui. Eux, et d’autres responsables… Le Saute-Rhin de mentionner ainsi l’influence de grands groupes privés.
Or il se trouve que Guillaume Nicloux (dont j’apprécie bien des films, dont The End avec Gérard Depardieu, Thalasso, avec le même Depardieu et Michel Houellebecq…) a connu André Dhôtel, qu’il mentionne dans plusieurs interviews.

Que j’ai écrit il y a quelques années un petit article, paru à La route inconnue, sur André Dhôtel et… l’intelligence artificielle. Il y était question notamment d’oiseaux de fer, que nous appellerions aujourd’hui des drones. Comme ceux qui bombardent ces temps-ci Gammalsvenskby – cf. site en lien de ce blog…



En lien de ce blog, aussi, le site de Julia Eriksson. Elle rentre donc d’un voyage au Japon ; on en reparlera sans doute… Le 5 mai, cela a donné l’article « Tiden och tillvaron nästintill olaglig » – « Le temps et l’existence aux confins de l’illégal. » Il y est question notamment du sentiment d’être dans l’illégalité tant l’étrangeté du pays est agréable et la situation (le trajet en avion) particulière :

« (...) den fascinerande känslan av att vuxenlivet kan få vara så här också, i alla fall för ett slag, som om vi skapat oss en Murakamisk lucka till en annan tillvaro och nu njuter vi av den fullt ut. »

« (...) le sentiment fascinant que l’âge adulte peut connaître cela aussi, pour un temps au moins, comme si nous nous étions créé une ouverture murakamienne vers une autre réalité ; et que nous en profitions pleinement. »

J'ai vécu un peu l’inverse à Kungälv. Et en l’occurrence, peut-être qu’une intelligence artificielle aurait été moins xénophobe qu’un employé de police privée…


Nils Blanchard

mardi 21 mai 2024

Eau (courante), inondations

Je me souviens avoir reçu une punition lorsque j’étais en sixième, donnée par un professeur de français fantastique, originaire de Toulon. Là, il me fallut écrire « quatre pages de rédac » sur les inondations. J’ai peut-être gardé mon texte quelque part, corrigé… Mais je ne me souviens plus ce que j’y écrivis.

NB – Mai 2024, Mûrs-Érigné

À Angers, il y a en mai une exposition des Archives patrimoniales au « Repaire urbain », jusqu’au 31, sur les bains douches de la ville. Un article de Ouest-France (quand on n’est pas en Alsace, on peut trouver quelque intérêt à la presse régionale bien sûr) du 7 mai dernier, explique que ce n’est qu’en 1950 que les salles de bain se sont généralisées à Angers. Et l’eau n’est arrivée dans les maisons qu’à partir de 1956. Autant dire que les bains publics ont eu une certaine importance.

Quant à la survivance des bains douches, l’article n’est pas très clair ; il est d’abord avancé que le dernier a fermé en 1998, puis qu’ « il y en a un encore derrière la Bourse du travail, fréquenté par les SDF ».


Le Bain des Treilles (bord de Maine)

(Au passage, on a sur cette lithographie un aperçu des bords de Maine d’ancien temps, consciencieusement arasés par les constructions de voies rapides des années Pompidou. Ou des années 60-70 tout court, vu qu’on trouve trace de mêmes âneries à Göteborg, comme l’écrit Åke Edwardson dans Det trettonde fallet (2021).)

Or il se trouve que je me promenais à Mûrs-Erigné – qui jouxte Angers – et que je pris en photo la façade d’une ancienne auberge, dite « Hostellerie du Château ».


NB - Mûrs-Érigné, mai 2024


NB - Mûrs-Érigné, mai 2024


On y fait la promotion sur le panneau de droite, de l’« eau courante chaude et froide » et du chauffage central.
À gauche, on a quelque chose comme « Au rendez-vous des gars du Nord ».
Quel Nord ? Demanderait André Dhôtel.

Bon, mais à Haguenau quelques jours plus tard, sans vouloir faire de rapprochement trop facile, les inondations ont quelque chose d’une immense laverie, surtout quand un peu de lumière se glisse sur les nouvelles eaux. On a l’impression que des bestioles diverses arrivent par enchantement, peut-être parce qu’elles n’ont plus à se préoccuper des pesticides dans les champs (on va me traiter d’écolo excité), que certaines voies sont débarrassées des véhicules humains faisant ronfler leurs moteurs, spécialité locale…


NB – Mai 2024, Haguenau


NB – Mai 2024, Haguenau



Nils Blanchard

samedi 18 mai 2024

Nils Holgersson ; Autres blogs – Citations et destinations inattendues, et peste (1)

Dans un blog, espagnol comme son titre ne l’indique pas (HobbyHorse), en lien indirect de celui-ci (il est en lien d’Alluvions), un article sur l’antisémitisme s’ouvre sur une allusion à Nils Holgersson, de Selma Lagerlöf.

NB - Mai 2024

Or donc, Álvaro de La Rica commence ainsi son texte :

« De ahora en adelante – escribió Selma Lagerlöf en El maravilloso viaje de Nils Holgersson a través de Suecia –, siempre que me encuentre en un callejón sin salida, pensaré que no es así. No olvidaré que puede evitarse el daño propio sin perjudicar al otro. Nunca falta una tercera salida: lo bueno es encontrarla”. »

« Dorénavant – écrivit Selma Lagerlöf dans Le merveilleux voyage de Nils Holgersson à travers la Suède – chaque fois que je me trouverai dans une impasse, je penserai toujours que ce n'est pas le cas. Je n'oublierai pas que l'on peut s’éviter du mal sans pour autant que ce soit au préjudice de l’autre. Il y a toujours une troisième voie : l'important est de la trouver". »

Puis de rappeler que Selma Lagerlöf – sur laquelle on aura l’occasion bien sûr de revenir plus amplement assez vite – a séjourné à Jérusalem en 1899-1900.
Et de poursuivre :

« Estamos viviendo en Occidente una nueva ola de antisemitismo. La respuesta militar israelí a los ataques del pasado 7 de octubre ha renovado esa forma de odio, nunca vencido, de una parte no menor de la opinión pública occidental. (…) »

« Nous vivons en Occident une nouvelle vague d'antisémitisme. La réponse militaire israélienne aux attaques du 7 octobre dernier a ravivé cette forme de haine, jamais vaincue, d’une partie non négligeable de l'opinion occidentale. (…) »



Et j’avais conservé dans mes « archives » – on ne se refait pas, quoique… c’est une autre histoire – une « lettre politique » de Laurent Joffrin dans Libération, en date du 18 février 2019, intitulée « Le retour de la peste ». Il y était commenté un événement arrivé en marge d'une manifestation des bons gilets jaunes :

« Bien sûr, il faut répéter, comme nous l'avons fait hier, que les insultes proférées contre Alain Finkielkraut sont insupportables et que les opinions du philosophe, quoi qu'on en pense par ailleurs, n'ont rien à voir là-dedans : ce n'est pas par goût de la joute intellectuelle que des manifestants se sont attaqués à lui, mais bien en raison de sa qualité de Français juif, ce qui signe l'agression raciste. L'inquiétude supplémentaire vient d'un phénomène plus insidieux que la persistance – déjà honteuse – de réflexes antisémites en France : elle vient de l'abaissement des défenses immunitaires de la société et d'une partie de la scène politique face à ce retour de l'immémoriale peste. »  

Par là-dessus, la politique récente du gouvernement israélien « permet » à certains faquins de se désinhiber, s’adonnant notamment à leur sport favori consistant à assimiler les israéliens à des nazis – ce genre de comparaison « c’est comme le nazisme » ne servant la plupart du temps qu’à montrer que son auteur n’a aucune idée sérieuse de ce que fut le nazisme.
Étrangement, l’assimilation au nazisme a aussi été employée par le gouvernement russe pour « justifier » son attaque de son voisin ukrainien.


Nils Blanchard


Triche : je rajoute ici deux étiquettes du dernier billet : André Dhôtel, Karin Boye.

mardi 14 mai 2024

Ecran libre

Tombé il y a quelque temps déjà sur le numéro 42 de la revue Les feuilles libres, janvier-février 1926. Là-dedans, Marcel Arland (c’est autour de lui que j’étais en quête, mais c’est une autre affaire), Crevel, Vitrac… d’autres dont Tristan Tzara et… Ernst Josephson.





Tristan Tzara était marié avec l’artiste suédoise Greta Knutson (qui est passée par l’atelier d’André Lhote, comme d’autres artistes scandinaves – il faudra reparler un jour de cela… Et André Lhote a croisé André Dhôtel... – qui a croisé lui-même Marcel Arland, René Crevel et Roger Vitrac…) Elle a peut-être, dans le style, un lointain cousinage avec Camille Claus, parfois évoqué ici ; cela aussi est une autre affaire…

Greta Knutson, Intérieur avec femme et enfant; capture d'écran


Mais en l’occurrence, c’est de Tzara et d’Ernst Josephson, dont on voulait parler. En 1926, Dada a expiré sous les coups (?) du surréalisme. En mai 1996, un article de Jean-Pierre Thibaudat (Libération), évoquait la pièce Cœur à gaz, de Tzara, montée par Sylvain Dhomme au théâtre Confluences. Cela commence à faire un certain temps, mais Thibaudat de rappeler précisément que depuis 1921, et le pugilat qu’elle avait entraîné entre ses acteurs d’une part, André Breton et ses acolytes de l’autre, depuis 75 ans donc, « la pièce végétait en français dans son édition rare illustrée par Max Ernst. Ici et là, certains (Belges, Suédois) s'aventurèrent à la monter, Andy Warhol avec d'autres en fit une lecture à New York ». 
(« Végétait »… Il y avait quand même eu une représentation au Musée d’Art contemporain en 1982…)




Eh, on retrouve là-dedans des Suédois (à Confluences). C’est un hasard complet. Par contre, Tristan Tzara, en 1926, est déjà marié avec Greta Knutson. Cela explique-t-il la présence d’Ernst Josephson au sommaire des Feuilles libres ?
Leurs noms se retrouvent aussi sur la couverture d’un livre, dont, de cela aussi, il faudra que l’on reparle…



Bon, mais Greta Knutson et Tristan Tzara se sont installés dans une maison à Montmartre, rue Junot, qu’ils ont fait construire par un architecte autrichien, Adolf Loos, en… 1926.


Nils Blanchard


P..-S. : Je rentre d’une énième traversée d’une grande partie de la France, qui me laisse en retard, sur tout, plus que d’habitude sans doute. Et peu importe. Mais là, sur le site en lien de ce blog (Ent’revues, il suffit de cliquer, à droite, dans les liens, en haut francophones, au milieu un peu tout et anglais, en bas suédophones… ou simplement ici-même) je tombe sur Lueurs. Cette traversée donnera lieu sans doute à quelque bavardage en ces parages ; sur les saint Jean, tenez, l’Évangéliste, le Baptiste…

Mais, bref, je voulais évoquer dans ce billet ci-dessus aussi Karin Boye, le mouvement Clarté… Et voilà que je tombe, donc, sur Lueurs. Le court article qui accompagne cette référence parle des dix ans de la mort de Jean Grosjean, avec le premier cahier de l’association de ses amis, de 2016. (Jean Grosjean évoqué, ici, il n’y a pas si longtemps... Ah, et je reparlerai aussi vraisemblablement de certains pays de clairières que je traversai.)

jeudi 9 mai 2024

Vérité, mensonge, fiction… et hasards

Il faudrait pouvoir retenir le temps bien sûr. J’en suis encore à des réflexions – au sens premier du terme d’abord, de « reflets » – lancées l’année dernière. Sur quoi s’interpénètrent (pardon, un certain langage universitaire?) des références plus anciennes…



Cette image par exemple, tirée d’une collection de STF (Svenska turistföreningens Årskrift – bulletin annuel de l’association du tourisme en Suède), héritée de mes grand-parents, en l’occurrence l’exemplaire de 1944 (!), que j’ai feuilleté pour préparer un cours sur la Suède et la Seconde Guerre mondiale. Elle me ramène bien sûr à celle d’Owe Zerge.


Des hasards, aussi… Cette représentation de la mort jouant aux échecs est issue d’une voûte peinte de l’église de Täby (Uppland).
Or musardant sur le blog en lien de SLS, je tombe sur une annonce de conférence sur la façon d’interagir avec un saint (dans la Finlande médiévale…) (Ça a eu lieu le 8 mai à Helsinki…) La photo de la présentation montre un plafond d’église décoré…


Double hasard : j’ai fait une marche il y a quelques jours autour d’églises – entre Aube et Haute-Marne – entre autres à pans de bois. Suis tombé en arrêt devant cette statue de saint Gond, à Outines…
(On reviendra sur tout cela…)

NB - Saint Gond, bois polychrome, vers 1510-1520.

L'image de la mort jouant aux échecs m’a fait penser à un article du Göteborgs Posten sur le dernier livre de Salman Rushdie (de Johan Hilton, le 16 avril dernier), dans lequel il évoque notamment la tentative d’assassinat dont il a été victime en août 2022. Couteau s’appelle le livre – Kniv en suédois.

Et le mot me ramène, cinématographiquement, à Polanski, son premier film en 1962 étant Le couteau dans l’eau, dont l’image ci-dessous – couple illégitime, pour faire vite – ramène à celle d’un récent billet de ce blog ; Assassins et voleurs…

Le couteau dans l’eau, Jolanta Umecka et Zygmunt Malanowicz

Mais en l’occurrence, Johan Hilton, le 16 avril, débute ainsi son article :

« Naturligtvis är Ingmar Bergman en av referenserna som far genom skallen på författaren Salman Rushdie, dagarna efter attentatet i Chautaqua, New York.
(...) Nu rör sig alltså till slut Döden mot honom – inte helt olik Bengt Ekerots sinistra uppenbarelse i Bergmans ”Det sjunde inseglet”.
Svartklädd, svart munskydd, ansiktslös. »

« Naturellement, Ingmar Berman a été une des références qui a traversé l’esprit de Salman Rushdie, dans les jours qui ont suivi l’attentat de Chautaqua, à New York.
(...) Finalement, en effet, la Mort s’occupe de lui – pas si différente que la sinistre apparition de Bengt Ekerot dans Le septième sceau.
Vêtue de noir, masque noir, sans visage. »

Puis encore, du 15 au 19 avril, France culture a diffusé une série d’entretiens réalisés dans la maison new-yorkaise de Salman Rushdie, par Christophe Ono-Dit-Biot, en partenariat avec le magazine Le Pointdans l’émission « À voix nue ».

Là, il est question à un moment de vérité et de mensonge, autour des âneries véhiculées – et crues – par les partisans de Donald Trump. Cette phrase me frappe :

« Le pays [les États-Unis] est très divisé. La division est si radicale qu’il est difficile de voir comment ça va se terminer. Il y a un nombre choquant de personnes qui ont perdu la capacité de faire la distinction entre vérité et mensonge. Ils ont été nourris quotidiennement par l’aile droite et ils croient en ses mensonges... »

L'incapacité de plus en plus partagée à distinguer ce qui est vrai de ce qui est faux. Plus exactement, il est inquiétant de constater l’absence de volonté de le faire sérieusement, semble-t-il, chez bien des gens, lors même qu’ils s’expriment, anonymement le plus souvent, sur les « médias » à leur disposition.

De son côté, Johan Hilton note dans son article :

« Inte minst som försvarstal betraktat, faktiskt ett av de mest övertygande argument jag läst för att klichén om att ordet är mäktigare än svärdet faktiskt talar sant.
För här vaskar Rushdie fram det litterära värdet ur en i bokstavlig mening värdelös handling och formar omsorgsfullt om det till något som alltid har fått människor att orka leva vidare: berättelsen. »

« Non seulement comme un discours de défense, vraiment c’est un des arguments les plus convaincants que j’ai lu quant à la véracité du cliché selon lequel la parole est plus puissante que l'épée.
C'est qu’ici Rushdie extrait la valeur littéraire d’un acte sans valeur proprement parler et le transforme soigneusement en quelque chose qui a toujours donné sens à la vie humaine : le récit. »

Bref, un livre encore à lire.


Nils Blanchard

vendredi 3 mai 2024

Kungälv blues

 À vrai dire, malgré la beauté notamment de sa rue (son ancienne rue) principale, cette ville m’a toujours semblé un peu tristounette. (Ce billet fait suite à ceci, à cela...) 

NB - août 2023

C'est particulièrement le cas depuis quelques années (les travaux sont encore en cours) : le centre ayant permuté de l’ancienne rue piétonne (prolongée par la rue des – fort belles – vieilles maisons dont on reparlera) à une espèce de centre commercial immense, « Kongahälla » (on reviendra aussi sur cette appellation…) D'où la photo ci-dessus de cette rue délaissée.

Justement, le 26 juin dernier, avant les scandaleuses grandes vacances des professeurs, j’avais évoqué un faux dernier article de Thomas Nydahl, qui évoquait une sorte d’enfer moderne…

De l’ancienne rue passante (que prolonge donc la vieille rue "principale" et que l'on voir sur la première image de ce billet), la librairie, notamment, a été transférée au centre commercial, où l’on est si bien accueilli par des employés de société privée représentant une vague police…

Par contre, malgré les apparences, le cinéma, non loin de là, est toujours en activité. Pour combien de temps ?

NB - août 2023

A résisté aussi, dans la rue principale, un marchand de fromages très fréquenté.

Le cimetière, près de l’ancienne gare de bus (transférée elle aussi du côté de Kongahälla) existe toujours lui aussi ; il n’a pas encore été remplacé par un fast-food.

Attention, dans les strictes limites de cette étrange (k)ommune, il ne faut pas avoir trop de choses à jeter ; les ouvertures des poubelles sont strictement rationnées par toutes sortes d’ingénieux systèmes (au moins des fonctionnaires locaux méritent-ils leur salaire).

NB - août 2023

Mais ce qui fiche peut-être le plus le mouron, c’est la statuaire. Certes, a subsisté ceci :

NB - août 2023

Pour le reste, on a une flopée d’ œuvres évitant soigneusement tout réalisme (au vu de quelque néopuritanisme?)

NB - août 2023

Ceci qui précède : près de Kongahälla, précisément. (Il vaut mieux essayer de ne pas lui attribuer de réalité…)

NB - août 2023

Ceci, devant l’ancienne biscuiterie qui a fermé il y a peu (son activité aurait été transportée dans un pays balte).

NB - août 2023

Du coup, cette partie de la ville n’est pas très joyeuse non plus.

Et non loin de là, ceci, ci-dessous :

NB - août 2023

Cela :

NB - août 2023

Allez, on va murmurer que je me suis assez exercé au tir sur ambulance.

Mais j’ai gardé le meilleur pour la fin, devant l’hôtel de ville :

NB - août 2023

N'y a-t-il pas une lointaine parenté avec mon édition de Kafka ?



Nils Blanchard


P.-S. : Ajout ici de l'étiquette (longue...) "Les Soulèvements de la Terre", que je n'ai pas eu la place d'ajouter à l'avant-dernier billet ("Bermont - Au-delà de la civilisation").

Cernay – Sennheim ; camp annexe et autres – Et précisions

Cernay (germanisé en Sennheim par les nazis) a été le lieu d’élection d’un camp de formation SS  comme il en a été question ici , et là , à ...