mardi 16 avril 2024

Gris Mitterrand

Il a été évoqué dans ces liens le « gris Mitterrand », à propos de l’architecture. On peut en parler aussi, dans un autre sens, à propos de ces années où il n’y avait « pas d’ADN ni de téléphonie, ni de caméras de surveillance à l’époque, mais une enquête toute psychologique, un choc entre personnalités », dans le film Garde à vue de Claude Miller (1981).



C'est Argoul qui en parle, le 14 avril dernier, dans un très bon article qui permet de se remémorer avec plaisir ce film aux dialogues (Michel Audiard), réalisation (Claude Miller donc) et interprétations (Michel Serrault, Lino Ventura, Romy Schneider, Guy Marchand) fantastiques. Puis ça se passe à Cherbourg ; c’est assez au nord, ça.
Le « gris », Mitterrand ou pas, peu importe, c’est une certaine place laissée au doute ; c’est cet interstice entre le « bien » et le « mal » des modes de pensée binaire où se glisse… l’État de droit.

Et – de ça aussi il a été question ici –, Argoul note : « Aujourd’hui, le suspect serait lynché par les réseaux sociaux avant même de pouvoir s’expliquer. » C’est pire encore, son nom est balancé dans les médias (pas seulement les prétendus « sociaux ») comme un os aux chiens.
Argoul poursuit : « En 1981, le public éclairé était plus en faveur des libertés que du soupçon – l’époque a changé, et pas toujours en bien. »

Bon… Mais il faut précisément un peu de recul pour « juger » une époque, la nôtre comprise (et Argoul d’évoquer, aussi, transparaissant de ce film, la violence des méthodes d’un des policiers). Mais je ne crois pas non plus que sur le chapitre de l’état de droit qui a mis tant de temps à se construire – on peut au moins remonter à Louis XVI abolissant la torture –, on évolue « en bien ».



Par ailleurs, j’ai revu récemment, avec Michel Serrault justement, et Jean Poiret, Magali Noël, et Darry Cowl… Assassins et voleurs, de Sacha Guitry.
C'est assez fantastique aussi, ce film de 1957, qui se passe entre Deauville – passablement au nord aussi – et Paris et qui, comme le remarque une fiche de presse : « retourne toutes les valeurs morales ». Mais je me demande si un certain néo-puritanisme actuel ne le rendrait pas hautement suspect de nos jours : ne pourrait-on lui reprocher de faire l’éloge de l’adultère, d’une trop grande mansuétude à l’égard des voyous ?
En nos temps où l’on veut à toute force que tout un chacun soit prêt à exhiber sa vie privée exemplaire, tout en cachant ses « opinions » derrière un anonymat généralisé…

Magali Noël et Jean Poiret, dans Assassins et voleurs


Nils Blanchard

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