samedi 28 juin 2025

Des temps et des oiseaux de fer

À cette journée au Mont-de-Jeux fin mai (Ardennes) consacrée à André Dhôtel, dont il a déjà été fait mention ici, une troupe amateur, le Théâtre de la Grande Oreille, a donné une représentation d’une partie de l’adaptation radiophonique de L’Île aux oiseaux de fer.

NB - Mont-de-Jeux, baraquement d’André Dhôtel

 
J'ai déjà parlé de ce livre ; il a une actualité étrange et dramatique. Son épitomé : Julien Grainebis, le héros des contes du même nom, est repris de l’envie de voyager, quitte Bermont et embarque du Havre sur le Tourterelle où il est engagé comme steward avec Daniel, personnage hâbleur et vaguement maléfique, qui pousse Julien à l’eau en pleine mer, quelque part dans le Pacifique à proximité d’une étrange île. Julien Grainebis rejoint l’île à la nage et est tout de suite accueilli – et peut-être sauvé de requins – par ceux qui donnent son nom au roman : les oiseaux de fer. Ce sont des sortes de drones – on ne devait pas employer le mot en 1956 –, qui servent de police, notamment morale et politique, à un gouvernement sans tête de l’endroit, dictatorial, totalitaire pour mieux dire. Le gouvernement – ses manifestations en tout cas – y est une hydre déconcertante d’intelligence artificielle et de psychologie.
Julien Grainebis est intégré tant mien que mal aux travailleurs de l’endroit – on a quelque chose de Kallocain (La Kallocaïne) de Karin Boye –, mais parviendra, aussi logiquement qu’invraisemblablement à faire « buguer » (ce terme non plus n’existait pas en 1956) les oiseaux de fer, mais aussi à entraîner dans sa fuite amoureuse une psychologue…



Or comment ne pas songer que tous ces drones sont – entre autres bien sûr – une marque des conflits actuels, notamment celui entre la Russie et l’Ukraine ? (Récemment, il a été annoncé que Renault devrait construire des drones en Ukraine, de même que la marque produisit des chars pendant la Première Guerre mondiale…) Kiev, Odessa, Gammalsvenskby, sont régulièrement touchés par des drones ou des bombes planantes. La population de Gammalsvenskby a été réduite quasiment à néant ; on lit sur ce blog en lien de celui-ci, le 19 juin (Sofia Hoas) :

« Det är nu bara 7 personer kvar i byn. De uppmanas att lämna. Det är livsfarligt att köra ner nödhjälp. Innan det ryska anfallskriget började bodde det 2300 personer i byn. Det fanns bl.s. skola, vårdcentral, ålderdomshem, butiker, kulturhus och kyrkor. Alla de är nu jämnade med marken eller utbrända. »

« Il n’y a plus que sept personnes au village. On les presse de partir. On risque sa vie quand l’on y achemine de l’aide d’urgence. Avant la guerre d’agression de la Russie, le village comptait 2300 habitants. Il s’y trouvait notamment une école, un centre de soins, une maison de retraite, des boutiques, une maison de la culture, et des églises. Tout cela est désormais rasé ou brûlé. »

Le blog Argoul de conter d’évoquer un ancien voyage à Odessa, le 17 mars 2023, et :

« Les gens d’Odessa méritent qu’on se souvienne d’eux.
Avec l’invasion russe à prétexte xénophobe, d’un clair racisme anti-occidental, l’Ukraine résiste.
Ce sont des gens ordinaires, des vieux qui ont encore l’habitus soviétique mais qui sont heureux d’en avoir fini avec les contraintes du « communisme », des hommes mûrs qui sont au front pour défendre leur travail, leur famille et leur patrie (mais oui, Pétain-Poutine !) ; des jeunes qui aspirent à l’avenir en Europe et à vivre selon leurs goûts.
Tous ceux que j’ai vus il y a 17 ans sont peut-être au front, peut-être déjà tués… Souvenir. »

NB - juin 2025, Strasbourg

Temps qui passe, passablement bouleversé en temps de guerre. Or j’écris ce billet d’une salle d’attente d’un vaste hôpital de Strasbourg, d’une ville en paix, donc… Le NHC (Nouvel Hôpital Civil), est une véritable ville dans la ville. La notion du temps y est comme transformée, de même que les repères géographiques – un peu comme sur une île. Je m’y repère notamment grâce au copain un peu râleur de l’emblème de ce blog, déjà évoqué, le garçon au poisson.

NB - juin 2025, Strasbourg

Que sont devenus, que deviendront les gens que je croise, que j’ai croisés ici ?


Nils Blanchard


P.-S. Il y a ces temps-ci une publicité qui met en scène des… oiseaux de fer, pour la marque « Macintosh » je crois. Ce sont là des volatiles métalliques dont le gros du corps est une caméra qui vient espionner ls regardeurs de « smartphones » (on se demande bien pourquoi ces volatiles perdent leur temps de la sorte!) ; une « application » (de protection des informations, des donnés?) les fait exploser en vol…

Triche. Ajout d’étiquettes du dernier article, à savoir : Iran, François Hollande, Donald Trump.

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