lundi 30 décembre 2024

La forêt, la maison...

Beaucoup de choses que je voudrais faire, voir. Expositions, à Evian, près de Neuchâtel, ailleurs encore... dont je pourrai rendre compte ici avec un peu de chance…

Elin Danielson-Gambogin – Capture d’écran

 Mais l’heure tourne. Les dates défilent… Julia Eriksson, le 16/12 : « Jag har bara glömt att december har ett begränsat antal dagar och att det här med att tacka ja till allt är ungefär lika kul som utmattande. » - « J’ai seulement oublié qu’il n’y a que 31 jours en décembre et que cela qui consiste à accepter toutes les propositions, est à peu près aussi agréable qu’épuisant. » Les week-end, les moments de vacances, ont été trop souvent gâchés ces derniers temps par les miasmes gentiment partagés par cette espèce d’idéologie sotte et grégaire (les deux vont souvent ensemble) du « marche ou crève », sans parler de nos bons compatriotes qui se précipitent sur vous pour se moucher salement (comme s’ils regrettaient qu’on ne les ait pas suffisamment mouchés tout simplement...)

Elin Danielson-Gambogin – Capture d’écran


Il y a des choses, aussi (et évidemment… mais…) auxquelles que je ne pourrai pas assister. Ça se passe à Helsinki, à des dates où je ne peux me libérer même si c’est avec grand plaisir que je retournerais en Finlande. C’est le site SLS – mine d’archives, d’annonces… sur les « Suédois d’ailleurs », de Finlande notamment… – qui annonce ces deux colloques (à droite de l’écran, version ordinateur, en lien...

La forêt, idées et erreurs


La maison (le foyer), qu’est-ce que ça dit de nous ?

Une exposition à laquelle je devrais pouvoir assister – j’arriverai bien à passer quelques jours à Paris avant le printemps ! –, à Paris, aussi – justement ? On devrait en reparler… – : celle sur l’intime au Musée des Arts Décoratifs.



La nudité là-dedans.
D'aucuns s’étonnent de la présence de nus en multitude en ce blog. Peut-être la nudité est-elle précisément entre ces deux thèmes : la forêt, une certaine sauvagerie, animalité, en lisière de la civilisation… et l’habitat, au cœur de cette civilisation peut-être, et pourtant lieu de l’intime.

On voit cela au détail d’une photo sur le blog Krickelins, par exemple. Un joli bas-relief – de qui ?

Krickelins, capture d'écran


Mais toujours sur SLS, annonce de livres nouveaux annoncés. De ceux-là, aussi, j’espère pouvoir reparler ici dans pas trop longtemps.

Livre sur l’antifascisme suédo-finlandais.
(On retrouve là le thème de travail, inversé, d’un journaliste rencontré lors de cette conférence sur les Norvégiens de Cernay, qui travaille sur l’extrême droite alsacienne d’avant-guerre, Claude Mislin.)



Livre sur… Elin Danielson-Gambogin.



Parmi d’autres, grand Dieu, parmi d’autres !


Nils Blanchard


P.-S. : Je n’arrive toujours pas à rattraper mes étiquettes. J’ai rajouté celles-ci, du dernier billet : Per Krohg, Folke Bernadotte, Christian Krohg, Rudolf Heberle, Sten Sparre Nilson, KL Neuengamme.

mercredi 25 décembre 2024

Norvégiens à Cernay, 2

Retour à cette conférence du 28 novembre, avenue de la Marseillaise, d’Elsa Kvamme notamment.
À l'automne 1944, l’ensemble du groupe d’étudiants norvégiens est à Cernay (Sennheim pour les Allemands).

NB - Avenue de la Marseillaise


On l’a dit, beaucoup d’étudiants passé par Cernay sont passés, repassés parfois par Buchenwald, et notamment lors de ce dernier automne de guerre. Ceux qui sont encore alors à Cernay voient les alliés approcher. On a le témoignage d’Elling Kvamme, un rescapé du groupe de Norvégiens, dans l’article (déjà cité au premier billet) de Claude Mitschi : « Les Alliés n’étaient, au moment de notre arrivée, déjà plus qu’à quelques dizaines de kilomètres de Sennheim et on comprend mal que les Allemands aient gaspillé du matériel ferroviaire pour nous transporter sur une telle distance. »

C'est une des particularités, tenaces, du nazisme dans la guerre (du fanatisme…) ; une fois n’est pas coutume comme dit l’autre, je peux citer mon petit livre. Page 59, il y est question du traitement des déportés à la fin de la guerre, lors que tout indique que celle-ci est perdue, que le « Reich de mille ans » se couvre de ruines. « Ils [les nazis, les SS encadrant les camps annexes de Struthof] continuent néanmoins de les [on parle des déportés juifs] martyriser, ainsi que les autres déportés, en contradiction avec des objectifs économiques qui auraient nécessité des hommes suffisamment bien portants pour le dur labeur qui leur était exigé. Et dans le même temps, on ne pouvait douter de la proche défaite allemande, perspective qui aurait pu aussi entraîner un adoucissement des conditions de détention pour préserver l'avenir ; il n'en a – quasiment – rien été. »
La « solution finale », la brutalité stupide, ont été prioritaires par rapport aux enjeux stratégiques de la guerre.




Beaucoup de Norvégiens de Sennheim - Cernay avaient été affectés à une usine de Bitschwiller-lès-Thann. Là aussi, les Allemands doivent évacuer les lieux à partir de septembre 1944.
On l’a vu, des malades sont restés en arrière ; le 13 novembre, encore 70 étudiants norvégiens sont évacués par la Croix-Rouge. Il reste alors 450 prisonniers, qui partent le 21 novembre de Cernay pour Buchenwald.

À partir de là, divers groupes vont connaître des sorts différents, entre marches d’évacuations, transferts… Ainsi 170 restent en gare de Fribourg où ils subissent le bombardement allié (et participent activement aux secours – un étudiant meurt).
Finalement, un premier convoi d’étudiants norvégiens quitte Neuengamme – lieu de regroupement des Scandinaves (et autres) « mis de côté » et donc sauvés des camps, à la suite des transactions entre les nazis et le comte Folke Bernadotte notamment – le 20 avril 1945 pour le Nord, par les bus blancs affrétés par la Croix-Rouge. La plupart des membres du groupe sont de retour en Norvège autour du 25 mai.

J'avais noté dans mon livre (une fois n’est pas coutume, etc.), page 95 : « Une dernière information ajoute à la désolation de son destin [il s’agit d’Elmar Krusman]. Huit jours après son décès, le 21 mars 1945, 28 Scandinaves des camps du complexe Wüste ont été mis de côté (pas encore libérés, mais pour le moins vraisemblablement sauvés) du fait de l'intervention de la Croix-Rouge suédoise avec le comte Folke Bernadotte. »

Per Krohg - Capture d'écran


On a beaucoup insisté, lors de cette conférence, sur la logique, la rationalité pour ainsi dire active des étudiants norvégiens. Aux chefs nazis, pour le moins obtus, parfois franchement timbrés, qui les ont pris en charge, leur proposant l’uniforme SS – les Norvégiens refusent –, tel ou tel travail… les étudiants opposent les dispositions de Genève, qu’ils connaissent et comprennent. Aux « professeurs » nazis – la lie des intellectuels –, les étudiants combattent pied à pied, attaquent, dans le domaine scientifique, et laissent pantois leurs adversaires intrinsèquement ignares.
Les menaces d’exécution ne les font pas plier non plus.


Per Krohg - Capture d'écran


Et pourtant on imagine leurs pensées, amères ; souvenirs des amours et rivages laissés en Norvège en cet exode dans un monde de brutalité et de bêtise.
Y avait-il – la question a été posée à la conférence comme je l’ai noté au précédent billet – quelque chose qui prédisposât ces étudiants à la résistance ? Une réponse qui fut donnée – juste sans doute, mais suffisante ? – est celle de leur instruction. On avait là de futurs médecins, professeurs, que sais-je… capables de prendre du recul, de contester des arguments fallacieux. Bon. Mais n’avait-on pas aussi de ces gens dans le camp allemand ?
L'éducation norvégienne des années vingt – trente était de très grande qualité ? Mais beaucoup de cadres allemands avaient fait leurs classes sous la République de Weimar ; l’école y était-elle déficiente ?
Il y a là un champ d’étude comparative des systèmes scolaires de différents pays ; travail délicat, difficile – c’est un professeur qui parle – de se retrouver entre programmes officiels, actions réelles menées par les professeurs, discours à vide, parfois, d’inspecteurs n’ayant aucune idée de ce qu’est un élève…

L'année dernière à l’université, j’avais touché mot à mes étudiants d’un assez vieil article (1953) de Sten Sparre Nilson : « Aspects de la Vie Politique en Norvège » dans la Revue française de science politique (3e année, n°3, pp. 557-558.) :

« L'échec du fascisme en Norvège offre un contraste saisissant avec le succès du National-Socialisme allemand, contraste d’autant plus frappant que les conditions économiques dans certaines des régions les plus nazies d’Allemagne, telles que le Schleswig-Holstein étaient à certains points de vue assez semblables à celles de la Norvège.
Dans son livre De la Démocratie au Socialisme, Rudolf Heberlé a montré comment les nazis remportèrent leurs grandes victoires électorales aux élections du Reichstag de 1930 et 1932 dans la région agricole du Schleswig-Holstein, y obtenant un pourcentage de voix supérieur à celui qu'ils recueillaient dans toutes les autres provinces d'Allemagne. Ce fut même le seul district électoral du Reich dans lequel le parti nazi obtint en juillet 1932 la majorité absolue (51 %). Dans les parties rurales de cette province, Hitler recueillit plus des deux tiers  du total des voix (...) »  

Pourquoi ici, pas là ?


Nils Blanchard


P.-S. : annonce de l’exposition consacrée à Christian Krohg (père de Per Krohg, dont des peintures illustrent ce billet) au musée d’Orsay.

Capture d'écran


Aussi : triche sur les étiquettes ; Johannes Grenness, Le Courrier du Mémorial, Josef Terboven, Arnold Raestad, KL Buchenwald, Bohuslän, Stavern, Sigmund Strømme, Westerbock rajoutées.

- Joyeux Noël !

NB



vendredi 20 décembre 2024

Nord(s), dhôteliens et autres

J'ai évoqué la publication récente (novembre 2024) du Cahier André Dhôtel n° 22. Deux textes de votre serviteur : « Mars » (la guerre dans la vie d’André Dhôtel) et une étude sur « La guerre dans L’homme de la scierie ». Bon, mais bien d’autres choses encore, entre autres un extrait (les années de guerre) de la correspondance de Dhôtel avec Pierre Leprohon.

A. F. van der Meulen, Le siège de Lille (Wikipedia)

Or comme le note Roland Frankart dans son introduction à ces lettres, c’est à Gravelines, près de Saint-Omer (et entre Calais et Dunkerque) en 1924 qu’André Dhôtel a rencontré Pierre Leprohon, qui a été en fait son premier éditeur. Et homme d’art, de cinéma, Pierre Leprohon a été aussi un homme de revue (Le Rouge et le Noir aux éditions desquelles Dhôtel a publié son premier livre.

D'autres revues encore ; Corymbe, Cinémonde

Ce séjour de Dhôtel dans le Nord (six mois) a fait l’objet d’un livre récent.



Cela – la guerre, et des revues – me ramène à un tout autre sujet, à ce colloque qui a eu lieu à Paris (à l’Inalco) en novembre 2021, de l’Association pour les Études nordiques : « Entre Scandinavie et Baltique orientale ».
J'y évoquai la revue Sovjet Estland, petit journal hebdomadaire de propagande édité pendant la première et courte occupation soviétique de l’Estonie (automne 1940 à l’été 1941) par le Parti communiste de la province de Läänemaa, région du nord-ouest de l’Estonie, édité à TallinnLes actes de ce colloque devraient paraître bientôt dans la Revue nordique (en lien de ce blog, les liens, à droite…)
Or en attendant, le dernier numéro (numérique) de cette revue porte sur le thème de la solitude et de la nature.

Y est publié un texte (traduit par Camille Deschamps-Vierø) de Fridtjof Nansen, « Friluftsliv », discours prononcé en juin 1921 – date de naissance d’Elmar Krusman – lors d’un rassemblement de l’Association Norvégienne de Randonnée Pédestre pour les écoliers. (On est trois ans avant la rencontre entre Pierre Leprohon et André Dhôtel ; et tous les deux étaient des marcheurs, un peu différents : Dhôtel, un promeneux, flâneur, Leprohon : quelque chose d’un randonneur…)

Nansen en vient très vite à des changements en faveur de la nouvelle génération :

« Il existe désormais une toute nouvelle perception du sport et de sa valeur, une accélération sans précédent dans son essor et sa popularité auprès de la jeunesse de Norvège. C’est tout particulièrement le ski qui a ouvert la voie, et c’est là que la différence avec ma jeunesse est particulièrement frappante. Je me souviens que je pouvais aller skier dans la Nordmarka et retrouver les traces que j’y avais laissées quatorze jours auparavant. Aujourd’hui, je pense qu’il ne faudrait pas attendre longtemps avant qu’il ne devienne difficile de les retrouver. Mais peut-être qu’il n’y a pas que du positif dans cette évolution. Il est possible qu’elle ait engendré trop de compétition sportive au détriment du simple exercice physique ; trop de « records » et de spécialisation. »

NB - Auvergne


Difficile de ne pas suivre du regard certain sport actuellement très en vogue, d’autant plus quand on lit un second avertissement de Nansen :

« À mon avis, un autre aspect de la vie sportive contemporaine a pris trop d’importance, et il s’agit de son caractère grégaire.
Tout se passe comme si l’on ne pouvait plus faire de sport sans attroupement. Il faut des clubs et des associations, des compétitions sportives, des rencontres régulières en société et dans des chalets.
Mais une composante importante du sport devrait être la friluftsliv : s’éloigner des foules, de la course incessante, du bruit confus où nous passons l’essentiel de nos vies pour nous retrouver dans la nature, dans l’immensité des grands espaces. Voilà à mes yeux le cœur de la friluftsliv. »

Friluftsliv, vie en plein air mot à mot, s’opposant explique Nansen à la vie des villes, où les êtres humains vont essentiellement d’un bâtiment à l’autre, d’une boîte à une autre.

NB - Auvergne


Bon, à rebours de ce qu’il annonçait au début de son article, l’explorateur se fait un peu vieillard grincheux. Néanmoins, je ne puis m’empêcher de trouver de ses propos assez adaptés à nos temps aussi :

« Mais si les jeunes ne recherchent pas les grands espaces et l’éloignement de cette vie ordinaire, ce n’est certainement pas par manque d’attrait. Bien au contraire. C’est plutôt parce que la plupart d’entre eux suit simplement le même troupeau que les autres, et qu’ils ne savent pas comment s’en échapper, ni combien il est en réalité facile d’apprendre à se débrouiller par soi-même en dehors des sentiers battus – ils pensent que c’est une affaire coûteuse et compliquée. Mais celui qui a goûté une fois à la vie libre, sans entrave, indépendante de tout et de tous, celui-là ne retourne pas facilement dans le troupeau. »

Ce texte interroge au vu de ce refus évoqué au billet précédent, refus de masse, des étudiants norvégiens d’entrer dans la SS, de la Norvège en général de se plier au joug nazi.
Question… d’éducation, peut-on se demander ? La question fut posée lors de cette conférence avenue de la Marseillaise. J’en touchai mot quelques mois plus tôt aussi à mes étudiants. On en reparlera.


Nils Blanchard

dimanche 15 décembre 2024

Norvégiens à Cernay, 1

Le 28 novembre dernier, conférence d’une cinéaste connaissant son sujet (elle est la fille d’un des étudiants en question, mais ça ne suffit pas bien sûr contrairement à ce qu’on croit par ci par là, elle s’est documentée aussi), Elsa Kvamme. Son thème "Les étudiants norvégiens de Cernay (1943-44) : une tentative d'incorporation dans la SS qui a échoué”.

NB - Strasbourg, avenue de la Marseillaise

Venue avec des compatriotes au café Michel à Strasbourg – avenue de la Marseillaise –, elle a fait un tour à la fois personnel et, j’insiste, sérieux, sur la question.

(Ce témoignage-recherche, issu d’une personne de la génération d’après, me ramène à cette autre conférence, à Bisingen, qui m’a amené à parler ici du camp de Westerbock…)

Est intervenu notamment aussi, spontanément du public, Maurice Carrez (auteur avec Jean-Marc Olivier de Histoire des pays nordiques, 19e-21e siècle, Armand Colin, 2023) pour contextualiser cette page de la résistance norvégienne dans l’histoire, l’importance de cette résistance à l’échelle du pays. Une quarantaine de milliers de résistants (à l’échelle du pays…), des pasteurs, des instituteurs, professeurs, qui refusent en masse de prêter allégeance aux nazis.
Face à eux, doublement marionnette car peu estimé somme toute des Allemands, Quisling, et son « Rassemblement national »… Mais le vrai maître de l’occupation était Josef Terboven, avec le titre de commissaire du Reich.



Évidemment, cela ramène à certaines pages du Tableau de Savery (pages 58-66). Il y est question du grand-père (maternel) de Martin Fahlén, ancien ministre norvégien des affaires étrangères, Arnold Raestad (il en a déjà été question ici, voir l’index, à droite…)

Pages 60-61 : « Arnold avait dirigé la radio norvégienne avant la Seconde Guerre mondiale, et il avait fait plusieurs exposés sur les ondes contre le nazisme. Il en prédit très vite l’issue dans une de ses émissions, avec ces mots : « Le gouvernement allemand a décidé une fois pour toutes de se débarrasser de l’État norvégien. Ce sera peut-être plus difficile que ne le pense l’envahisseur. »
Le 9 avril 1940, Märta et lui durent fuir précipitamment. Arnold avait alors 62 ans et Märta 58. Ensuite, au temps de l’exil, Arnold devint l’un des conseillers les plus écoutés du gouvernement en exil.
Il rédigea des lois et organisa des contacts radio avec la flotte de commerce norvégienne pour qu’elle soit intégrée au camp allié et groupée sous une même bannière : Nortraship. Avec plus de 1000 navires, cette compagnie devint la plus grande du monde, et eut une certaine part dans l’issue de la guerre. Il eut en plus la responsabilité du transport de l’or et fut pendant les années de guerre le chef de la banque norvégienne à Londres. La réserve d’or devait être évacuée de Norvège dans le plus grand secret, en partie sur des bateaux de pêche. »

Johannes Grenness, capture d'écran


Quant aux étudiants de Cernay, un article de Claude Mitschi, dans une revue « Le Courrier du Mémorial » (liée au mémorial du Schirmeck, dont une association était par ailleurs organisatrice de la conférence du 28 novembre à Strasbourg), pages 22 à 35 d’un numéro d’avril 2019, offre un panorama intéressant et sérieux sur cette étrange page d’histoire.

Petit résumé chronologique des événements : le 30 novembre 1943, 1200 étudiants norvégiens sont raflés à Oslo. (La Norvège est occupée par les nazis depuis le printemps 1940, son gouvernement légal en exil.) Certains d’entre eux étaient par ailleurs résistants, mais ce n’est pas à ce titre qu’ils ont été arrêtés ; l’université norvégienne était remuante, et Terboven crut faire coup double en matant les étudiants et en espérant en faire en même temps des SS, mais son initiative provoqua des protestations importantes (en Suède, par exemple) et mécontenta sa hiérarchie.
Les étudiants refusèrent l’« offre » d’intégrer la SS et la plupart des étudiants sont d’abord envoyés dans un camp de Stavern (fjord d’Oslo). 500 d’entre eux environ sont très vite relâchés.

Les plus de 600 restant vont former deux groupes : un premier (291 étudiants) part pour l’Allemagne le 9 décembre 1943, un deuxième (353 étudiants) le 7 janvier 1944.

Sigmund Strømme, cité par Claude Mitschi, se souvient bien plus tard « des lumières le long des côtes de la Suède, mais personne n’osa prendre le risque de se jeter à l’eau. Il faisait trop froid, nous n’avions aucune chance de nous en sortir. »
Peut-être ces côtes étaient celles du Bohuslän, où je me suis souvent baigné, depuis ma tendre enfance, mais, il est vrai, en été…

Johanness Grennes, capture d'écran


Le premier groupe se retrouve à Cernay (Sennheim pour les Allemands), qui était par ailleurs un SS-Ausbildungslager (centre de formation SS, où se côtoyaient les volontaires de plusieurs nationalités). Parmi eux, les malades sont envoyés dans divers hôpitaux militaires, les récalcitrants aboutissent à Bitschwiller-lès-Thann, pour travailler dans une usine.

Le deuxième groupe est d’abord dirigé vers Buchenwald (13 janvier). Après une première période où ils sont traités comme des déportés « ordinaires », ils connaissent ensuite un sort privilégié, et reçoivent des cours de professeurs de l’université d’Iéna.
Entre juillet et octobre 1944, ils finissent par rejoindre Cernay.


À suivre.


Nils Blanchard


Triche. Je suis assailli d’étiquettes sur mes derniers billets : suis obligé de rajouter celles-ci, du dernier (9 décembre) : Dixikon, Thomas Nydahl, Paris, France Culture.
Et certaines manquent, qui paraîtront au billet suivant. 

lundi 9 décembre 2024

Notre-Dame, Trenet, Zelensky

 Je ne veux pas courir après les actualités ; j’écrivais que ce blog n’a pas vocation à les courser… Mais Notre-Dame, dans un sens, me poursuit – je ne dois pas être le seul… Nouvel article sur Dixikon (en lien de ce blog), de Robert Azar, mais réédité du 18 août 2023 : « Restaurer un monument – Après l’incendie de Notre-Dame ».

Capture d'écran


On y rappelle entre autres qu’une première flèche avait existé du temps de Jean Fouquet (quinzième siècle), qu’elle fut détruite ensuite, reconstruite par Viollet-le-Duc, et à nouveau donc...


Jean Fouquet, La main droite de Dieu protégeant les fidèles

Pour ce qui est de l’histoire plus récente, deux choses ; parmi d’autres, le 7 décembre, une chanson de Trenet a été interprétée le 7 décembre à Notre-Dame. Se souvient-on que Trenet avait chanté, dans son album posthume : « Je n’irai pas à Notre-Dame / Chanter mes petites chansons / Chanter les poètes et leur âme / Si près de Dieu dans sa maison / (…) Je n’irai pas à Notre-Dame / Je n’ai pas l’autorisation... »
Dominic Daussaint en parlait le 14 février 2006 sur le site spécialisé dans l’œuvre et la vie du Fou chantant, « Le portail des amis de Charles Trenet ».

« Trenet évoque sa nostalgie de n'avoir pas pu chanter à Notre-Dame de Paris et regrette de n'avoir pas pu offrir à Dieu quelques chansons : Je n'irai pas chanter La mer , était-ce vraiment un scandale, de la faire danser en l'air, aux voûtes d'une cathédrale ?
À l'époque, le poète avait reçu un refus catégorique des autorités ecclésiastiques, un veto alors justifié par les préférences sexuelles de l’artiste… (…)
L'Eglise n'est pas un théâtre, oui mais on chante au Paradis! Je n'irai pas à Notre-Dame, je n'ai pas l'autorisation. Ai-je bien mérité le blâme, d'offrir à Dieu quelques chansons ? »



Aussi, à Notre-Dame, ce 7 décembre : présence de Volodymyr Zelensky. Applaudi, quand même... Il doit y avoir quelque chose de bizarre à voir fêter la reconstruction d’un édifice en France, lors que son propre pays subit quotidiennement les bombes de l’envahisseur.
Donald Trump lui aurait accordé un quart d’heure, si j’ai bien compris, avant la cérémonie…

Le matin, émission « Répliques » (Alain Finkielkraut, sur France Culture). Étrangement, A. Finkielkraut ne sut permettre à ses deux invités de discuter à peu près équitablement. Il y avait le politicien Pierre Lellouche. En face de lui, Nicolas Tenzer, auteur de Notre guerre, Le crime et l’oubli, pour une pensée stratégique, L’Observatoire, 2024. Lui, indépendamment de ce qu’on en peut penser par ailleurs, refusa les attaques ad-hominem – il était facile de rappeler par exemple les liens politiques de Pierre Lellouche avec un François Fillon… –, de hausser systématiquement la voix… Résultat, on entendit beaucoup moins ce qu’il avait à dire que ce qu’avait à dire son « contradicteur ».

Bien sûr Pierre Lellouche n’avait pas complètement tort de rappeler le danger de la guerre atomique.
Mais le meilleur moyen d’éviter une telle guerre est-il de « munichiser » tous nos échanges avec Vladimir Poutine ? Malheureusement (on préférerait que cela, ces errements du pouvoir russe, n’existât pas, continuer à faire de l’argent avec leur gaz…), Nicolas Tenzer avait raison de rappeler les différentes tueries auxquelles s’est livré le régime de Vladimir Poutine.

Il se trouve que j’ai reçu (et lu) de Suède récemment un petit livre qui évoque précisément le caractère particulièrement mortifère du régime russe actuel. Il est édité par Mikael Nydahl, le fils de Thomas Nydahl qui a été déjà évoqué dans ce blog (voir index, à droite…)



On en reparlera bien sûr.


Nils Blanchard

jeudi 5 décembre 2024

Entre Aube et Haute-Marne / saint Nicolas – Jean Balthazar

Il a déjà été évoqué ici cette marche du printemps dernier entre Aube et Haute-Marne, d’églises en églises (pour leurs pans de bois, vitraux…), marche prolongée par des arrêts ici et là, lorsque j’ai l’occasion de traverser cette région.

NB - Dans l'église d'Outines


Je me suis vite rendu compte qu’il y avait quasiment dans chacune des églises visitées quelque allusion à saint Nicolas (tableau, sculpture).
On le reconnaît assez facilement à son vêtement épiscopal (mitre, crosse…), et à cette cuve contenant trois enfants, auprès de lui.


NB - Dans l'église de Juzanvigny; un peu flou, mais... 


Ignorant du détail de l’histoire, j’ai fini par y revenir. Pour résumer, des enfants se perdent en forêt, sont récupérés par une sorte d’ogre (qui deviendra le « père fouettard ») qui décide d’en faire ni plus ni moins (des enfants en question), que du petit salé. D’où la cuve ; les enfants sont cuits, assaisonnés, prêts à être mangés.


NB - Dans l'égilse de Droyes

Mais saint Nicolas passe par là, intervient, et non seulement sauve – ce mythe est quand même assez particulier – mais ressuscite les trois enfants.

(Images de mer dans les deux précédents tableaux – saint Nicolas, outre celui des hommes célibataires, est le patron des marins et bateliers, entre autres…)

(Alors, une question que je me pose : est-ce de là que vient l’expression « lardons », pour désigner les jeunes enfants?)

NB - Dans l'église de Vallentigny

Bon, mais ensuite, saint Nicolas est plus ou moins associé au « père Noël »… Quant au père fouettard, il continue de l’accompagner ; les deux ont visiblement sympathisé.

(Alors, je me pose une question : est-ce la base d’un certain type d’éducation bien ancrée dans les mœurs ?)

NB - Dans l'église d'Outines


Pour finir, l’histoire en question se serait passée au troisième siècle et / ou au sixième en Lycie (sud de l’Anatolie), d’où une phalange d’un saint réunissant pour ainsi dire les deux siècles aurait été amenée en Lorraine via Bari. Du coup, saint Nicolas est devenu le patron de la Lorraine, d’où sa présence dans les sanctuaires d’Aube et de Haute-Marne qui n’en sont pas si éloignés.

(Coca-cola a participé à fixer le personnage du père Noël. Où serait passé le père Fouettard dans l’affaire ? Elon Musk ?)



Nils Blanchard

lundi 2 décembre 2024

Marche ou crève, hiver qui vient / Maternités

Impression d’avoir le temps de ne rien faire. Pourtant, cette année, je n’enseigne plus à l’université. J’ai fini un article dont je suis assez content, sur la guerre dans un roman d’André Dhôtel.
D'ailleurs, le cahier a paru ; je ne saurais trop le recommander, il suffit d’aller voir sur le site de la Route inconnue (vers le haut, à droite de l’écran, version ordinateur...) 



Mais cette façon de se croire toujours obligé de faire quelque chose, voire… de croire avoir quelque chose à faire… comme ces gens qui s’imposent des réunions inutiles, des procédures sottes, et croient travailler de la sorte.

Je ne dois pas être le seul.
Krickelins, le premier décembre, parle de « självuppfunna måsten » – « les must qu’on s’impose » ; la traduction n’est pas aisée… (Bon, et visiblement, elle a une légère déprime liée à un passage d’une maison à une autre ; on connaît ça, ceci aggravé par les rigueurs lumineuses de l’hiver qui arrive :

« Jag är alltid påverkad av ljuset och säsongerna i mitt arbete. Man tänker mest på det då man inte har det. Som nu under vintern.
Dagarna då ljuset knappt visar sig alls. Inomhus kan det kännas som det är kväll en hel dag och jag går och väntar på de får lunchtimmarna då jag skulle kunna plocka fram kameran för att föreviga det jag planerat och sedan blir klockan tre och det är kört. »

« La lumière, les saisons ont toujours une influence sur mon travail. Et on y pense surtout en moment de manque. Comme maintenant avec l’hiver.
Ces jours où le jour se montre à peine. À l’intérieur, on peut avoir l’impression que c’est le soir toute la journée et je m’apprête, laisse passer le moment du déjeuner, et voudrais prendre l’appareil photo pour capturer ce que j’ai prévu mais il est déjà trois heures et le moment est passé. »

Capture d'écran


Et sur une image de ce blog apparaissent étrangement Jane Birkin et Serge Gainsbourg. Et la statue me rappelle une autre, dans le cimetière de Puellemontier. Marche évoquée déjà par ici ; Haute-Marne, Aube…
Le temps lui a forgé une étrange apparence « thanatosienne ».

NB - Puellemontier


NB - Puellemontier

Autre tracas, ces fatigues de fin de semaines, semi-crèves (sens imagé du terme) transmis par les charmantes têtes blondes qui se mouchent à qui mieux mieux comme pour se venger des mois de Covid – auxquels, visiblement, beaucoup de leurs parents n’ont rien compris…

Et quant à nos édiles, à moitié élus ; leur « marche ou crève » de petits enfants martiaux terrifiés par les « agences de notation » (il faudra bien un jour que quelqu’un se décide à les remettre à leur place…), nos édiles donc, de bavasser sur la nécessité d’aller au travail même quand on a un « petit rhume », d’imposer trois journées de carence aux fonctionnaires… (Ces politiques, aussi, des jalousies des uns contre les autres…)

Sandra (Holmqvist), elle, écrit (en lien, vers le haut, à droite…) le 27 novembre :

« Inte undra på att jag kroknar i en förkylning mot slutet av veckan. Jag jobbar hemifrån bäst jag kan, sover tiotimmarsnätter men är ändå trött, och när vi ska ut på en kort promenad för att få lite luft och titta på änderna vid bron så missar jag det sista trappsteget och stukar foten. »

« Pas la peine de se demander pourquoi je chope un rhume vers le week-end. Je travaille le plus possible à la maison, fais des nuits de dix heures et suis néanmoins fatiguée, et quand on sort faire une petite promenade pour prendre un peu l’air et aller regarder les canards près du pont, je rate la dernière marche et me foule la cheville. »

Des nuits de dix heures ?
Ma foi… Ça me rappelle une berceuse ; pas Gainsbourg, Dutronc

Dix heures, ça, ce doit être le lot du charmant petit bonhomme de bientôt trois ans, fils d’amis que j’évoquai vers les débuts de ce blog. Voilà un garçon avisé, visiblement ! Je ne l’imagine guère, plus tard bavasser comme certains petits marquis (ceux-là, pas élus du tout) dans le vide.


NB - Eva Blanchard, Maternité (tuffeau)


Il parle du reste peu. Mais en deux langues, s’il vous plaît !
J'ai traversé le Rhin, en bac, dans la nuit pour aller le voir.

Dans l’hiver qui arrive.

Et dans l’hiver qui vient
je pense à Héloïse
Ses sylvestres chemins
Ses batailles, ses bises



(Vers le haut de l’écran, à droite...)


Nils Blanchard

Cernay – Sennheim ; camp annexe et autres – Et précisions

Cernay (germanisé en Sennheim par les nazis) a été le lieu d’élection d’un camp de formation SS  comme il en a été question ici , et là , à ...