mardi 11 février 2025

Tidö, perspectives – temps long - 4

Les accords de Tidö ont été prévus, travaillés (avec quelle pertinence, c’est une autre affaire) ; 63 pages de contrat gouvernemental. L’attelage Barnier – RN, en France, semble avoir été plus improvisation d’un instant ; instant de panique ou de mauvais conseils d’obscurs marquis ?

NB

Ce billet, comme son titre l’indique, fait suite à trois autres :

- Tidö, France - 1 (15 janvier 2025).

Et récemment, le 7 février dernier, a été publié un article complet (Marius Perrin, Fondation Jean Jaurès, février 2025 ; il ne semble cependant pas bien tenir compte des dernières évolutions en France, et notamment de l’expérience Barnier, lors qu’il compare la Suède et la France dans sa dernière parie…) faisant le tour de la question que pose en Suède et en Europe le gouvernement suédois (issu de ces accords de Tidö).

(Drôle, de hasard, je parlai au premier billet de cette série sur Tidö de « cris continuels » dans l’hémicycle, lors du discours de politique générale de F. Bayrou. C’était le 14 janvier. Or, le 21, Argoul  évoque sur son blog le chapitre XIII (et ultime) du Livre III des Essais. Citons : « Nos députés qui font les lois ne sont guère meilleurs que les législateurs d’Ancien régime : une bande de singes braillards peut-elle énoncer ce qui est juste à l’intérêt général ? L’invective et la posture peuvent-elle susciter l’intelligence ? En quoi Montaigne est toujours actuel… Qui ne dirait que les gloses augmentent les doutes et l’ignorance ? »)

Julius Kronberg, La sagesse - Capture d'écran


Bon, pour ce qui est des deux partis d’extrême droite, les Démocrates de Suède de Jimmie Åkesson et le Rassemblement national de Jordan Bardella, on est frappé par certains traits communs entre les deux meneurs actuels. Tous les deux ont pris très jeunes les rênes de leurs partis : J. Åkesson est devenu porte-parole du sien quelques jours avant d’avoir 26 ans (en 2005), J. Bardella, lui, est devenu président du R.N. le jour même de ses 26 ans (en septembre 2021) !
Le premier publie une autobiographie en 2013 (il a donc alors 34 ans) ; le deuxième en a publié une en 2024 à 29 ans…
Plus sérieux : d’anciens Waffen SS se retrouvent parmi les membres fondateurs des deux partis.

Dans les faits, force est de constater que, paradoxalement, l’expérience suédoise, plus durable, est plus extrême dans un certain néolibéralisme – baisses d’impôts, lors que Barnier prévoyait plutôt de les augmenter ; il est vrai dans des situations économiques différentes –, baisses des allocations au chômage… Et, dans ce néolibéralisme, la partie extrême de l’attelage a essayé de freiner. On connaît de vagues remugles « gilets-jaunistes » du Rassemblement national. Pour la Suède, Marius Perrin rappelle (pp. 4-6) que « Le parti de Jimmie Åkesson n’avait de cesse depuis le courant des années 2000 de se poser comme le nouveau parti des classes populaires, attaché au concept de Folkhem (Maison du peuple) développé dans les années 1930 par le Premier ministre socialiste Per Albin Hansson et fortement associé à l’État-providence. »
L'alliance suédoise est allée plus loin aussi que ne le prévoyait Barnier (si vraiment ces gens prévoyaient quelque chose) en France pour ce qui est de la restriction de l’immigration.
Marque de son orientation fondamentale (on a rappelé d’où venaient les gens de « SD » – les Démocrates de Suède) : le gouvernement Kristersson a essayé de mettre en place une obligation aux fonctionnaires de dénoncer des situations de personnes en situation irrégulière !

Julius Kronberg - Capture d’écran

En Suède comme en France, la politique environnementale est la grande perdante de ces expériences (et, en France, de ses suites ; Bayrou ayant cru bon de s’en prendre, pour complaire à la FNSEA, aux agents de l’Office Français de la Biodiversité). Le nucléaire – ce n’est certes pas là l’apanage de l’extrême droite – est relancé plus que jamais… (Oui, décidément, une partie de ces gens semble complètement oublier l’est du Monde : la guerre en Ukraine, mais aussi et là encore, Tchernobyl, ou ce qui se passa au Japon, à Fukushima, en 2011.)

Marius Perrin (article de la Fondation Jean Jaurès) évoque les perspectives des Démocrates de Suède. Ils semblent avoir pris ce qu’ils pouvaient de l’électorat (plutôt de classes populaires) autrefois dévolu aux Sociaux-Démocrates. Il leur reste donc à continuer de grignoter celui de la droite plus modérée, ce qui pourrait à terme fissurer l’entente des deux blocs… Là, à nouveau, on remarque d’étranges correspondances entre les situations française et suédoise.
Quant à la question des raisons de la durabilité de l’expérience suédoise au regard de la française, posée le 15 janvier dernier, on a vu que J. Åkesson était « porte-parole » de son mouvement politique ; et il le contrôle. J. Bardella, lui, est « président » du sien, mais on sait qu’il y a quelqu’un au-dessus. Ceci explique peut-être cela.


Nils Blanchard


Et puis... 

On ne va pas parler sans cesse ici de Donald Trump. Mais alors que ce dernier ressort des Accords de Paris, de l’OMS, conspue la Cour pénale internationale… on peut se rappeler qu’en août 1941, Churchill est allé rencontrer Roosevelt au large de Terre Neuve. S’est ensuivi la Charte de l’Atlantique, qui a posé les bases du système international des Nations Unies. C’est ce système qui est remis en cause, aujourd’hui, par les grandes puissances plus ou moins grignotées par les « oligarques » : Russie et Chine d’un côté… États-Unis donc de l’autre.
Cette charte de l’Atlantique fut signée dans ce qui était, dans ce qui est toujours, les eaux territoriales du Canada, qu’un Trump aujourd’hui voudrait « intégrer » à « son » pays.

W. Churchill, F. D. Roosevelt, 9 août 1941

Il est vrai que la Charte de l’Atlantique fut, dans les faits, vite mise à mal, dès l’entrevue de Londres entre les ministres des Affaires étrangères britannique et soviétique A. Eden et V. Molotov du 26 mai 1942, le premier ayant dû concéder au second « glacis de sécurité » à ses frontières stratégiques. « Glacis »… avant-goût de vocabulaire de guerre froide…
Mais c’était en pleine guerre. On se demande quelles raisons ont poussé les extrêmes français actuels à devenir poutinolâtres dès les années 2010, peut-être avant…


NB

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Tidö, perspectives – temps long - 4

Les accords de Tidö ont été prévus, travaillés (avec quelle pertinence, c’est une autre affaire) ; 63 pages de contrat gouvernemental. L’att...