samedi 28 janvier 2023

Deux choses…

 Petit billet, rapide et imprévu. Mais il y a des choses, comme ça, qui (se) passent…

-- D’abord, je ne sais plus trop où, tombé sur une mention de ce film de 

1922. De Louis Delluc, celui du prix…





Ghetto de Varsovie, photographe non connu (Göteborgs Posten, 27 janvier 2023)

-- La Pologne revient beaucoup en ce moment dans mes lectures, jusqu’à 

cette traduction de Märtas tavla de Martin Fahlén, où il est question aussi

d’ancêtres de l’auteur qui vivaient en Pologne aux temps (XIXème siècle) où

celle-ci ne disposait plus d’État – était… nulle part, comme écrivait Jarry.

Et c’est une autre histoire.


Mais, le président polonais Morawiecki, hier, d’évoquer de « nouveaux

camps » que Poutine construirait, en référence à la Shoah.

On sait que je ne suis pas particulièrement partisan du président russe,

mais je trouve détestable cette façon de vouloir utiliser la Shoah, la 

ramener à un reste « moyen », la relativiser donc.


Je retrouve là ce qu’écrit hier Anna Grinzweig Jacobsson, dans le 

Göteborgs Posten :


« Fenomenet är del av en växande trend i många länder, och brukar kallas

förvanskning av Förintelsen, eller "Holocaust distortion” på engelska. Det 

är inte samma sak som förnekelse eller andra typer av rena faktafel, utan

något mycket mer subtilt. Metoden förvränger proportioner och perspektiv,

utan att nödvändigtvis fara med osanning. Just därför kan resultatet bli

extra lömskt och svårt att värja sig emot. »


« Ce phénomène participe à une tendance en progression dans beaucoup 

de pays, et on peut l’appeler déformation de la Shoah ou en anglais :

"Holocaust distortion”. Ce n’est pas la même chose que le négationnisme 

ou d’autres types d’erreurs historiques ; c’est quelque chose de

beaucoup plus subtil. C’est une façon de déformer proportions et 

perspective, sans nécessairement tomber dans la contre-vérité. Et c’est

pourquoi les conséquences en sont très sournoises et difficiles à combattre. »


À relire par ailleurs (de 2020), dans le Göteborgs Postenle témoignage de

deux… Suédois d’ailleurs, en quelque sorte, Ester och Leon Rytz, 

rescapés d’Auschwitz et Treblinka.



Nils Blanchard



mercredi 25 janvier 2023

Visage ; autoévaluation / le cas contraire…

 Que sait quelqu’un de son visage sinon qu’il est un autre – un autre que ce qu’on imagine ou voit (dans un miroir, tout juste un négatif), un autre que l’on guide à peu près néanmoins vers ce qu’en attendent les autres, comme on manœuvre un cheval, en se servant de techniques éprouvées, apprises…

John Bauer, autoportrait, 1908.

Peu de place à l’improvisation, là-dedans, et pourtant tout est improvisation. 

(Mais l’improvisation, elle-même : résultat d’un travail…)


Membre de la Route inconnue, travaillant à Brême, Peer de Smit

m’écrivait en juillet dernier :


« Die mehrfache Bedeutung von Gesicht als Wahrnehmungsorgan, als

Ausdruck (‚Antlitz‘), als ‚das Gesehene‘  und als Zukunftsvision könnte 

vielleicht auch Aufschluss geben über die besondere Bedeutung, die das

Gesicht immer wieder in Dhôtels Romanen hat. Da werden die Gesichter oft 

als ‚indifferent‘  beschrieben, aber zugleich wie durchlässig für das Zukünftige

und damit möglicherweise für ‚une autre intelligence, elle serait presque à

rapprocher de ce qu’on appelle le destin‘. »


« La signification multiple du visage comme organe de perception, comme

expression (visage), comme ce qui est vu et comme vision d'avenir pourrait

peut-être aussi nous éclairer sur l'importance particulière que revêt le visage

dans les romans de Dhôtel. Les visages y sont souvent décrits comme

indifférents, mais en même temps comme perméables à l'avenir et donc

peut-être à une autre intelligence, elle serait presque à rapprocher de ce 

qu'on appelle le destin»



Bon, mais quand on se lance dans André Dhôtel, on ne s’en sort plus…

Il mène à tant de gens. Patrick Reumaux, tenez… Un livre… publié au

Téraèdre en 2004… Titre : Histoire de visages – épistémologie des leurres.

J’avoue ne pas être sûr d’avoir très bien compris, mais j’en ai gardé

néanmoins un extrait qui me fait penser au Château que j’ai évoqué çà et là (il 

faut suivre !…) , où K, – où moi-même –, assistentde loin ! – à une

opération d’« autoévaluation » d’un établissement destinée aux lointains 

potentats du Château, basée sur le volontariat mais…


Gerhard Haderer

L’extrait (il est question d’Habermas, de Max Weber…): « Pour qu’il y ait

communication, il faut que la parole ou l’acte qui en témoignent soient

estampillés conformes, c’est-à-dire validés par une norme qui les légitiment.

Sinon… On n’ose pas penser à ce qui se passerait dans le cas contraire.

information, coordination de l’action, socialisation des acteurs, tels sont les 

maîtres mots de l’agir communicationnel comme système visant à

transmettre le savoir accumulé, à effectuer les normes adaptées à chaque

contexte particulier, enfin à construire les contrôles internes du

comportement et en particulier à former les structures de la personnalité.

(Habermas.) »


K, avec le Château : échec complet de toute tentative de communication.

Les personnages de Dhôtel se débrouillent mieux – mais ils ignorent 

simplement le Château. Quand on y réfléchit bien, ils sont à peu près à

l’inverse de ce qui est décrit dans les lignes précédentes.



Nils Blanchard



P.-S. : exposition mentionnée sur le site de l'Institut finlandais, (à la suite

des histoires de forêt)… : « Écoutons la forêt pousser, saison II ». Un certain

nombre d’artistes, designers… y sont conviés, dont Bo Haglund. Début d’un

entretien du 2 décembre dernier qu’on peut lire sur le site de l’Institut :


               «  Bonjour Bo ! Comment vous sentez-vous ici à Paris ?


Je suis très heureux d’être ici. Je suis arrivé [en France] depuis début Juillet,

quand j’ai commencé ma résidence à l’Hôtel Chevillon de Grez-sur-Loing. 

C’est une résidence artistique qui a été fondée par une fondation suédoise

dans les années 1990, car dans les années 1800, de nombreux artistes des 

pays nordiques sont venus y travailler. J’ai un superbe espace de travail, qui

était autrefois l’atelier de Carl Larsson. Grez-sur-Loing est un petit village 

paisible, d’où je peux facilement accéder à Paris et ses diverses expositions.

(…) »


On reparlera sans doute de Grez-sur-Loing. Peut-être via Philippe Delerm, par

ailleurs membre d’honneur de la Route Inconnue. Le monde est parfois petit,

comme on dit…



jeudi 19 janvier 2023

Forêt / métaphore

 Assisté donc aux deux premières journées d’un beau colloque (qui en comptait trois) à Besançon : « La forêt est une métaphore », 16-18 janvier 2023.

Besançon, hôtel de ville

Cette statue, adossée à l’hôtel de ville, devant cette pierre bleue et jaune

(pas n’importe quelles couleurs…) Parent lointain du garçon au poisson 

qui décore ce blog ?


Pour ma propre intervention, sur André Dhôtel, comme on avait vingt

minutes, je me suis astreint à ne pas trop déborder sur les territoires 

nordiques. Pourtant, évidemment, John Bauer – entre autres – avait sa

place dans mon propos, ses trolls offrant aux gens une liaison entre les 

mondes humain, animal, végétal (voire minéral), de la même manière – ou

presque… – que le cheval pie dans Le Pays où l’on n’arrive jamais.


John Bauer

Je relis François Squevin en sortant de ce colloque ; et… D’abord, il y a 

cet avant-propos de Jean-Marie Le Sidaner – on en reparlera… – où il est

question dès l’entrée de métaphore.

Et, ce poème, page 11(Forêt du corps) :


« Toujours le besoin de te chercher

de t’emplir les lèvres

et le corps tout entier


La forêt est trop seule »


John Bauer

Il a été question un peu du Nord dans la discussion qui a suivi une 

intervention de Solenne Guyot (Université de Strasbourg) sur « Les forêts

ibséniennes : s’y perdre ou s’y retrouver ? »

Et dans la conférence elle-même, bien sûr. Là, allusion notamment à… 

Peer Gynt.

Il faudra revenir à Ibsen ; tâcher d’en trouver une version norvégienne

bilingue.

Mais l’intervenante d’insister sur le fait que chez Ibsen (elle évoqua Le 

Tertre des guerriers, Le Canard sauvage et Peer Gynt), la forêt était le 

cadre d'occasions manquées.


Assez étrangement, en marge du colloque, j’en vins à discuter avec une

universitaire des « autoévaluations », ici et là ; peste « managériale » qui,

manifestement, n’épargne pas les universités de certains pays européens

Voilà qu’on demande aux gens de savoir de s’abreuver aux sources de ce

qui abrite parfois l’ignorance la plus crasse !

Mais je reparlerai d’« autoévaluation »…

Assez étrangement encore, en rentrant le soir, je lis sur le blog Bernur, au 

18 janvier donc, un article sur un livre de Henrik Johansson intitulé :

Fruktansvärda arbetsplatser jag besökt och de vackra människor jag där 

mött Des terrifiants lieux de travail que j’ai visités et des belles

personnes que j’y ai rencontré.


NB - Décembre 2022


On me dira qu’on sort du sujet. Pas vraiment ; je cite Bernur, qui cite 

Henrik Johansson, qui sort apparemment çà et là de la prose :


« Jag gick till skogen och sa inte:

Hur känner jag lyckan genom sorgen?

Skogen sa ingenting.

Jag sa:

Hur kan jag finna meningen med tystnad?

Skogen svarade att tystnaden bara är tystnad.

Och jag fortsatte gå till skogen. »


« Je suis allé en forêt et n’ai pas dit :

Comment est-ce que je ressens le bonheur à travers le malheur ?

La forêt n’a rien dit.

J’ai dit :

Comment puis-je trouver le sens avec le silence ?

La forêt a répondu que le silence est seulement silence.

Et j’ai continué d’aller en forêt. »


Ah, au colloque, cette citation qui a émergé, de Pierre Péju : « La forêt 

reste la forêt. »



Nils Blanchard



dimanche 15 janvier 2023

Forêt du corps

 De François Squevin, dhôtelien, et poète, j’ai lu avec beaucoup de plaisir il y a quelque temps Voyage nu. Et j’en parlais au dernier billet.

Ellen Thesleff, Nuit printanière, 1894, Ateneumin taidemuseo, Helsinki

Puis voici qu’il m’écrit, lors que je lui demandais si ça ne le dérangeais pas 

que je parle de lui en ce blog :


« “C’est dans le contact maintenu délicatement avec le paysage et les

saisons que je trouve la vertu la plus pénétrante de votre livre” – lettre à 

André Dhôtel d’Henri Thomas ; c’est bien là que j’ai cherché toute

aventure, dans la nudité du monde. »


Edith Södergran, comme André Dhôtel – c’est singulier, quand même ! – 

parlent de la « nudité des arbres ».

(À propos d’Edith Södergran, le site à elle consacré, en lien de ce blog, 

rappelle que 2023 est l’année du centenaire de sa mort.)


Dhôtel, dans le poème Orage (Le temps qu’il fait, 2000) :


« Les arbres nus tremblaient

devant nos regards vides

qui ne savaient plus voir

les fleurs des lendemains. »


Edith Södergran (dans Automne) :


« De nakna träden stå omkring ditt hus

Och släppa in himmel och luft utan ända, (…) »


« Les arbres nus entourent ta maison

Et laissent passer sans fin ciel et air, (...) »


NB - Anjou

Et l’on pourrait continuer. Dhôtel, dans La vie passagère, page 57, 

Chanson de l’apatride :


« Je ne saurais toucher

le soleil de ton corps.

Les pôles de tes collines

sont de beaux pays étrangers. »


Qui ramène, un peu au « Jag är främmande i detta land » – « Je suis

étrangère en ce pays » de Södergran.


François Squevin, on l’a vu, m’écrit quant à lui au dos d’une carte 

représentant le tableau Nuit printanière d’Ellen Thesleff, artiste finlandaise

suédophone.


Ellen Thesleff

Et, donc, dans l’envoi de François Squevin, son autre recueil : Forêt du 

corps, suivi de Neige (Éditions Preuves – Société des Écrivains ardennais

mais je n’ai pas l’année. Le volume est préfacé par Jean-Marie Le 

Sidaner ; on en reparlera…)

Là, page 15 :


Respiration extrême


Ultime réveil des corps

qui contiennent l’ouverture


L’air nous tient à hauteur de l’aube


Notre vraie nudité est celle des forêts


Bon, mais alors, forcément, je pense à un colloque auquel je participerai, à

Besançon, organisé par l’ELLIADD, « La forêt est une métaphore ».

J’y parlerai quant à moi de Dhôtel, bien sûr, du Pays où l’on n’arrive 

jamais.

Mais on y parlera aussi de contes, enfance, adolescence, du Japon,

Mircea Eliade, Pierre Michon, Le Clézio, Ibsen, Rousseau…


On en reparlera… (Cette expression finira par devenir le titre de ce blog…)



Nils Blanchard




Cernay – Sennheim ; camp annexe et autres – Et précisions

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