Que sait quelqu’un de son visage sinon qu’il est un autre – un autre que ce qu’on imagine ou voit (dans un miroir, tout juste un négatif), un autre que l’on guide à peu près néanmoins vers ce qu’en attendent les autres, comme on manœuvre un cheval, en se servant de techniques éprouvées, apprises…
John Bauer, autoportrait, 1908. |
Peu de place à l’improvisation, là-dedans, et pourtant tout est improvisation.
(Mais l’improvisation, elle-même : résultat d’un travail…)
Membre de la Route inconnue, travaillant à Brême, Peer de Smit
m’écrivait en juillet dernier :
« Die mehrfache Bedeutung von Gesicht als Wahrnehmungsorgan, als
Ausdruck (‚Antlitz‘), als ‚das Gesehene‘ und als Zukunftsvision könnte
vielleicht auch Aufschluss geben über die besondere Bedeutung, die das
Gesicht immer wieder in Dhôtels Romanen hat. Da werden die Gesichter oft
als ‚indifferent‘ beschrieben, aber zugleich wie durchlässig für das Zukünftige
und damit möglicherweise für ‚une autre intelligence, elle serait presque à
rapprocher de ce qu’on appelle le destin‘. »
« La signification multiple du visage comme organe de perception, comme
expression (“visage”), comme “ce qui est vu” et comme vision d'avenir pourrait
peut-être aussi nous éclairer sur l'importance particulière que revêt le visage
dans les romans de Dhôtel. Les visages y sont souvent décrits comme
“indifférents”, mais en même temps comme perméables à l'avenir et donc
peut-être à “une autre intelligence, elle serait presque à rapprocher de ce
qu'on appelle le destin”. »
Bon, mais quand on se lance dans André Dhôtel, on ne s’en sort plus…
Il mène à tant de gens. Patrick Reumaux, tenez… Un livre… publié au
Téraèdre en 2004… Titre : Histoire de visages – épistémologie des leurres.
J’avoue ne pas être sûr d’avoir très bien compris, mais j’en ai gardé
néanmoins un extrait qui me fait penser au Château que j’ai évoqué çà et là (il
faut suivre !…) , où K, – où moi-même –, assistent – de loin ! – à une
opération d’« autoévaluation » d’un établissement destinée aux lointains
potentats du Château, basée sur le volontariat mais…
Gerhard Haderer |
L’extrait (il est question d’Habermas, de Max Weber…): « Pour qu’il y ait
communication, il faut que la parole ou l’acte qui en témoignent soient
estampillés conformes, c’est-à-dire validés par une norme qui les légitiment.
Sinon… On n’ose pas penser à ce qui se passerait dans le cas contraire.
information, coordination de l’action, socialisation des acteurs, tels sont les
maîtres mots de l’agir communicationnel comme système visant à
“transmettre le savoir accumulé”, à “effectuer les normes adaptées à chaque
contexte particulier”, enfin à “construire les contrôles internes du
comportement et en particulier à former les structures de la personnalité.”
(Habermas.) »
K, avec le Château : échec complet de toute tentative de communication.
Les personnages de Dhôtel se débrouillent mieux – mais ils ignorent
simplement le Château. Quand on y réfléchit bien, ils sont à peu près à
l’inverse de ce qui est décrit dans les lignes précédentes.
Nils Blanchard
P.-S. : exposition mentionnée sur le site de l'Institut finlandais, (à la suite
des histoires de forêt)… : « Écoutons la forêt pousser, saison II ». Un certain
nombre d’artistes, designers… y sont conviés, dont Bo Haglund. Début d’un
entretien du 2 décembre dernier qu’on peut lire sur le site de l’Institut :
« Bonjour Bo ! Comment vous sentez-vous ici à Paris ?
Je suis très heureux d’être ici. Je suis arrivé [en France] depuis début Juillet,
quand j’ai commencé ma résidence à l’Hôtel Chevillon de Grez-sur-Loing.
C’est une résidence artistique qui a été fondée par une fondation suédoise
dans les années 1990, car dans les années 1800, de nombreux artistes des
pays nordiques sont venus y travailler. J’ai un superbe espace de travail, qui
était autrefois l’atelier de Carl Larsson. Grez-sur-Loing est un petit village
paisible, d’où je peux facilement accéder à Paris et ses diverses expositions.
(…) »
On reparlera sans doute de Grez-sur-Loing. Peut-être via Philippe Delerm, par
ailleurs membre d’honneur de la Route Inconnue. Le monde est parfois petit,
comme on dit…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire