lundi 10 juillet 2023

Vosges – Ardennes ; Descartes

 Série d’entretiens de Claudie Hunzinger, sur France culture, la semaine du 19 juin dernier. Avant cela, chez Alain Finkielkraut, le 6 mai : il était là question de chien. Mais de ça (de chien), on en reparlera.

NB - Canal de la Marne au Rhin

Claudie Hunzinger, elle, situe ses livres plus au sud que le canal de la Marne au Rhin, du côté de Colmar. (Du reste, le canal ne passe pas par les Ardennes non plus ; peu importe.)

On lit, en présentation du dernier entretien de la série :

« Pratiquant l’affût, Claudie Hunzinger a acquis au fil des années, une écoute très fine des êtres et des éléments, qu’ils soient végétaux, minéraux ou animaux. « On devient ce que l'on observe », dit-elle. Pour l'artiste, c'est une façon d'être à l'écoute du monde et de l'agrandir, « c'est une façon de se décoloniser soi-même » (…) »

Se libérer, comme l’écrit Thomas Nydahl, évoquant Imre Kertész (le 7 juillet dernier) :

« I detta kom Imre Kertész fram till kärnan: att bära en negativ erfarenhet genom livet behöver inte vara en börda. Den blir en börda för den människa som efter den erfarenheten förvandlar själva livet till just börda. För Kertész, och därmed för mig som lärdom, blir den en frigörelse. »

« En cela Imre Kertész est allé au nœud du problème : porter une expérience négative dans la vie ne nécessite pas que ce soit un fardeau. Ça le devient si la personne transforme sa vie en fardeau. Mais pour Kertész, et subséquemment pour moi, ça devient une libération. »


Ma vie extraordinaire, de Benoît Duteurtre, démarre, et revient régulièrement, aux Vosges de l’enfance de l’auteur. Sorte de paradis perdu, à la fois personnel (l’enfance) et de manière plus… globale, avec trois chapitres (« Le loup de Belbriette ») qui enserrent le livre, en partie d’anticipation (heureusement, souvent, dans ce domaine, on a tendance à se tromper…)
Ainsi lit-on page 227 :

« Tandis que le monde, sidéré, découvrait l’ampleur du désastre, Denis se rappelait son paradis perdu. [Qu’est-ce que je disais…] Après la Grande catastrophe de juin 2030, la perspective d’un refuge dans les montagnes lui apparaissait comme un espoir. (…) »

Une des conséquences de cette « grande catastrophe » est qu’il est nécessaire de détenir une sorte de pass pour entrer dans Paris. Et pourtant... 


O
n n’en est pas très loin… Quelqu’un, par exemple, qui n’utilise pas de smartphone se voit de plus en plus regardé de travers. (Ou n’est-ce pas que les gens qui utilisent beaucoup ces ustensiles ont tendance à ne plus regarder les autres qu’à travers leur écran, qui fait écran, qu’on le veuille ou non, devant une certaine réalité.)

Capture d'écran. Source?

Pas vraiment d’anticipation – plutôt l’inverse ; un peu Jean-Pierre Mocky au dix-septième siècle ? – chez Patrick Reumaux, dans Maison noire.
Puis là, on est passé dans les Ardennes, dhôteliennes à défaut d’être le « Dhôtelland » (comprenne qui voudra). Ce genre de pays où l’on pose un banc quelque part dans un village. Page 25 :

« Oui, il y a des Ardennais dans les Ardennes, à ceci près qu’on ne sait jamais de quelle Ardenne on parle – ni si ce dont on parle existe –, car le département qui porte ce nom n’est qu’un assemblage hétérogène estampillé par un coup de tampon administratif. »

Page 27 : « À deux pas de ma maison noire, sur la route de Saint-Lambert, au bas du village se dresse un tilleul, au pied duquel un banc a été aménagé pour que l’on puisse y prendre le frais. En plus de quarante ans, je n’ai jamais vu personne s’y asseoir. »

Et dans ce livre, beaucoup d’allusions à la Suède, mine de rien, vu qu’on y parle de mycologues, botanistes (Elias Magnus, un Finlandais aussi : Peter Adolf Karsten). Qu’un René Descartes, célébrité du village au banc, a quelque difficulté à parvenir à ses fins dans ses relations avec une reine de Suède…
Ou plutôt, il y arrive : il meurt.


À suivre.


Nils Blanchard


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