dimanche 9 octobre 2022

On y revient toujours, à ce pays

 Il est des moments où des thèmes, différents les uns des autres, peuvent se rencontrer. Ce blog en use, en abuse peut-être ?

                     R. Savery, Paysage de montagne avec animaux, Museum of Fine Arts

                                  Boston, image tirée de Märtas tavla de Martin Fahlén


Un peu avant de partir marcher dans les Cévennes en juillet dernier, je 

songeais à ce tableau du livre de Martin Fahlén (dont il faut que je m’occupe

de finaliser la traduction… Éditeurs, dernier appel ; après, tant pis pour 

vous…)

N’y a-t-il pas là quelque chose du « grand pays » de Dhôtel ? Rien à voir bien

sûr (aurait pu écrire précisément André Dhôtel), et pourtant, quelque chose 

d’un paradis perdu ; retrouvé.


NB

Et, lors de cette marche d’été déjà évoquée, vu à un moment, entre d’autres

chevaux, un cheval pie. Je ne pensais pas du tout alors au Pays où l’on

n’arrive jamais (1955), même si j’avais peut-être quand même, déjà, quelque 

part derrière la tête une conférence que je devrai faire en janvier prochain sur

le sujet.


J’ai relu récemment Le pays (dans une édition – Société Nouvelle des Éditions

G. P., 1963) que j’achetai il y a quelques année pour les illustrations de Guy

Michel.




Au passage, serait-il permis aujourd’hui à un auteur de doter l’un de ses 

personnages de la manie de collectionner les… moustaches  de chats (et de

félins en général) ?


Je suis chaque fois étonné (et étonné d’être étonné), en lisant (relisant

souvent aussi) des romans ou nouvelles de Dhôtel, de la présence de la 

guerre, surtout la Seconde Guerre mondiale, dans les intrigues. Étrangement,

à la fois discrète et essentielle.

Là, l’héroïne du roman, derrière laquelle court Gaspard, le personnage 

principal, et différents autres originaux, est « adoptée » enfançonne par un

homme riche, M. Drapeur, qui, malgré lui, dans les circonstances de l’Exode,

sépare la petite fille de sa mère considérée comme mourante. Page 136 :


« C’était pendant la guerre, à cette époque où les gens fuyaient devant 

l’invasion. M. Drapeur se trouvait à Sedan au moment où l’ennemi arrivait sur

la Meuse. Il fila dans sa voiture par les crêtes qui bordent le canal des 

Ardennes, et il eut l’occasion de s’arrêter dans un village perdu, pour

demander son chemin. C’était le village de Stonne, situé sur une colline 

couverte de forêts. »


Du coup, mère et enfant séparés ; l’enfant, à partir du peu de souvenirs qu’elle

a de sa mère, n’a plus de cesse que de la retrouver, elle et un mystérieux 

« grand pays ».




Bon. Mais je pensais en relisant tout ça à un autre Esto-Suédois, inscrit dans 

les camps (celui du KL Stutthof notamment), comme « Suédois », comme

Elmar Krusman : Arno Lundre. Je l’évoque dans mon livre pages 46-47 ; il est

mort à Buchenwald en novembre 1944. Après avril 1944, une de ses filles, qui

avait alors 16 ans, n’a plus entendu parler de lui, jusqu’à ce que Andrzej 

Olkiewicz ne retrouve sa trace au début des années 2000.


Là, père et fille séparés, donc. Pas vraiment de grand pays retrouvé – ou un

« grand pays » dont les souvenirs, braudéliens, auraient remonté à plusieurs

siècles – ; la fille d’Arno Lundre a migré en Suède avec la grande majorité des

Esto-Suédois.


                                              Dernière édition, à ma connaissance, du Pays



Dans le roman, place à une recherche, une enquête étrangement sylvestre, 

dans les Ardennes aux confins de la Belgique. Page 156 :


« Se serait-elle sauvée pour d’autres raisons que la guerre ? Pourquoi aurait-

elle gagné la France au lieu de se réfugier dans l’ouest du pays ? [La 

Belgique.] On se posait ces questions. On en discutait avec les gens des

villages, les fournisseurs et les concierges des châteaux. On ne parvenait à 

aucun résultat, mais rien que d’agiter ces questions redonnait de l’espoir (...) »


De l’espoir, pourquoi pas ?



Nils Blanchard



P.-S. : Annie Ernaux, prix Nobel de littérature le 6 octobre ; le dernier prix 

français était celui de Patrick Modiano (qui cite çà et là, soit dit en passant,

André Dhôtel…) De Peter Handke (préfacier de Dhôtel en Allemagne…), qui a

reçu le prix en 2019, il sera assez vite question en ces lignes.


Pour ce qui est des critiques littéraires que je « suis » un peu en Suède,

l’accueil d’Annie Ernaux est mitigé, que ce soit de la part de Mikaela Blomqvist

(critique au GP notamment, ou le tenancier du blog Bernur.


Bon… Mais moi je vais devoir à nouveau tricher avec mes « étiquettes »...



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