Nous voilà déjà au temps où, dans la région où j’ai passé mon enfance, se tient comme chaque année le parcours proposé par Art et chapelles en Anjou Or j’ai reçu une lettre récemment, d’une amie de La Route inconnue, de l’autre côté de la France, des Ardennes. Il y est question aussi de chapelles.
Chapelle allemande de 1917, Falaise (Ardennes) |
Pendant l’été, les articles de ce blog seront un peu moins nombreux
qu’à l’habitude, parce que je serai en vacances (les seuls moments
de l’année où un professeur, qui plus est mal noté, peut travailler un
peu sérieusement). Et on pourra s’autoriser quelque liberté par
rapport aux thèmes habituels de ce blog. Ou… Vraiment ?
Dès le premier article, on a parlé de paix, et de chapelles abandonnées.
On s’est pas mal interrogé – et l’on continue – sur la politique de
neutralité de la Suède.
Neutralité n’est pas pacifisme.
Dans le Göteborgs Posten, le 20 mars dernier, j’ai retenu le texte de
Jonas Eek (un prêtre, je crois) : « Varje kyrka är ett skyddsrum » –
« Toute église est un lieu protégé ». Il y est question bien sûr de la
guerre en Ukraine, de lutte entre bien et mal sur quoi je pourrais
revenir pour d’autres raisons… Et on lit ceci :
« Varje dag nås vi nu av bilder från krigets Ukraina. Vi blir åter
medvetna om krigets vansinne. Men det finns också andra bilder;
en som fastnat hos mig är kyrkan som ett skyddsrum. »
« Chaque jour viennent à nous des images de la guerre en Ukraine. On
reprend conscience de la folie de la guerre. Mais il y a aussi d’autres
images ; une, gravée en moi, celle d’une église comme un lieu
protégé. »
En l’occurrence, sur la carte, la chapelle allemande a dû être construite
non vraiment comme un abri, mais comme un hommage aux soldats
allemands tués au front.
Les pacifistes, eux, sont souvent peu férus d’hommages.
Un Paul Léautaud connaissait mieux les sépultures de ses chats dans
son jardin que les monuments à la gloire des soldats morts au front.
Paul Léautaud et ses chats |
Jugez plutôt ; il écrit à André Billy, le 23 novembre 1914
(Correspondance, Flammarion, 10/18, 1972, pages 443-444) :
« J’ai su, comme vous, la mort d’Alain-Fournier en même temps que
celle de bien d’autres, dont le nom m’était connu, sinon la personne.
J’ai fort bien connu Fournier. Je le voyais souvent au Mercure (…) Du
moins, Fournier, lui, y était parti [à la guerre], si j’en juge par une
lettre qu’il écrivit alors à Péguy, dans des sentiments guerriers. Je ne
sais pas, mais cela me dispose à m’attendrir un peu moins sur lui. (…)
Vous voyez bien, mon cher ami, que je n’ai pas acquis des sentiments
nouveaux, appropriés aux circonstances. Ces histoires me font horreur,
et la grandeur, je me le reproche quelquefois, m’en échappe. Là non plus, je ne
crois pas et mon manque de foi me fait me détourner.
(…)
J’ai toujours mes soucis. Je les ai même plus grands, ma réserve
d’argent épuisée et tous mes moyens se trouvant réduits à l’allocation
du Mercure. Je dure comme je peux. Je vis chez moi en pardessus, le
chapeau sur la tête, gelant, grognant, ricanant, plein d’impatience et de
sarcasmes. Quand nous foutra-t-on la paix, Grands Dieux ! Cette guerre
m’agace, que de choses elle m’a déjà coûtées, que de mauvaises
choses elles m’a déjà occasionnées, que de mécomptes, que de
soucis, que de chagrin ! Je devais passer de si belles
vacances ! Allez, moi aussi je suis bien atteint.
(…)
Il y aura quelque littérature patriotique, certes. Mais je crois qu’on
s’en lassera vite. Ne vous semble-t-il pas que nous sachions déjà
tout ce qu’on nous racontera là ? 1870 n’est pas si loin qu’on
garde encore quelque fatigue detoutes les balivernes qu’il nous
a values. (…) »
Alors, bien sûr, tous les conflits ne sont pas semblables. Et un (autre)
de mes projets – j’ai déjà pas mal avancé – est une étude de la
position de Léautaud – ce formidable écrivain – face à la
Seconde Guerre mondiale. Le moindre que l’on puisse dire est que
les sources ne manquent pas. Disons-le tout de suite :
Léautaud n’y apparaît pas si sympathique… Mais bien loin,
néanmoins, du mal incarné.
Nils Blanchard
P.-S. Annonce il y a quelques jours de la démission de la présidence
du Parti conservateur de Boris Johnson.
Je ne fais pas partie des gens qui l’ont bêtement comparé à
Donald Trump. Je me souviens d’une certaine classe, par exemple,
lors de sa rencontre avec la ministre d’État suédoise il y a
quelques semaines.
Et parlez-en aux Ukrainiens…
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