mardi 21 juin 2022

Brodern / Le frère

Mon frère m’a signalé une erreur dans un billet précédent, du 2 juin « Corps, genre ». La compagnie dirigée par Thibault Rossigneux n’est pas « Le sens des mots », mais « les sens des mots » (j’ai corrigé bien sûr).

Bror Marklund (Stockholm)

(Pourquoi cette statue ? Un simple jeu de mot sur le prénom de l’artiste.)

La nuance, à mon sens, est bien intéressante.
Déjà, de plus en plus, avec le niveau en orthographe de nos contemporains qui glisse dans des abîmes, dignes des plus vertigineuses failles océaniques, les mots auront plusieurs sens à prendre en compte, en fonction de leurs homonymies. Il faudra (faut?) se demander, quand un architecte vous écrira qu’il veut mettre tout en verre, s’il parle de la couleur ou de la matière…
Peu importe pour le moment : cette petite digression eut pour but simplement de remarquer qu’entre Michel Lamart et ses aphorismes sur les paroles, d’autres dont je reparlerai – et Paulhan ! –, je ne sors pas des sens des mots.
Soyons honnêtes, mon frère me permet d’introduire un autre sujet, celui d’un frère aussi, un autre frère, celui d’Elmar Krusman : Fridolf Krusman.
Je le savais, je le note dans mon livre (page 40), agriculteur, plus âgé qu’Elmar – il était né en 1912 –, intégré dans les troupes soviétiques : il meurt « sans doute à Mezen dans le nord de la Russie (Arkhangelsk), région où ont dépéri (du fait de l’impéritie de la logistique soviétique) une grande partie des incorporés esto-suédois, estoniens plus généralement, dans l’Armée rouge. » Sans combattre, vraisemblablement de fièvre, malnutrition, abandon.
(Le communisme supposé d’Elmar Krusman, dans ces conditions… À moins d’imaginer qu’il n’ait rien su – ou rien voulu savoir ? – du sort de son frère…)

SOV, juin 2022

Récemment, la SOV (en lien à droite de ce site), l’association esto-suédoise Svenska Odlingens Vänner – Amis de la culture suédoise a fait paraître un dossier sur ce sujet.
Fridolf Krusman apparaît bien. Il n’y a malheureusement pas de photographie.

On en arrive a un autre de mes thèmes de prédilection, si je puis dire : l’adversité, voire pire.

J'entendis le 16 juin dernier à la radio – hasard des télescopages de thèmes, parole, fratrie –, sur France culture (émission « À voix nue », avec Alain Lewkowicz), le 16 juin, la rabbin Pauline Bebe, expliquer :

« (...) Lorsque Caïn tue Abel, il ouvre la bouche (on le voit pas dans la traduction) : il lui parle mais on ne sait pas ce qu’il dit, la Bible est silencieuse… Et finalement, c’est une manière de dire que lorsque l’on n’arrive pas à mettre des mots sur un conflit, c’est la violence qui prend le pas sur les choses (…) »

Alfred Boucher, Caïn tue Abel, 1870.

Je ne sais pas s’il y a beaucoup de liens entre Abel et Caïn d’une part, mon frère et moi de l’autre – Elmar et Fridolf Krusman ? Les frères Krusman ont été tués à la même époque, en quelque sorte par des ennemis différents –, mais il se trouve qu’à cette conférence à Strasbourg dont j'ai déjà parlé (au Collège doctoral européen), j’ai évoqué, avec prudence, une comparaison entre les histoires de certaines communautés juives et les Esto-Suédois, en ce sens que ces derniers aussi étaient attachés à l’écrit.

Cela pourrait être approfondi.


Nils Blanchard


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