Il est temps de dire quelque chose de ce Garçon avec un poisson, qui illustre ce blog.
C'est totalement par hasard que je suis arrivé à m’intéresser à ce thème sculptural, dont on trouve relativement facilement sur le net d’autres exemplaires.
NB - Hapsal (Haapsalu), été 2018 |
Hapsal (Haapsalu), été 2018; la cocarde commémore les 100 ans de l’indépendance (la première) de l’Estonie. NB |
Hapsal (Haapsalu), été 2018. On voit sur cette dernière photo au moins deux autres poissons aux pieds du garçon. NB |
Ce thème du garçon au poisson, d’où vient-il ?
On retrouve beaucoup ces sculptures, dans des villes d’Europe du Nord notamment. L’association du garçon et du poisson est-elle à lier au symbole chrétien du poisson ? Ou est-ce l’enfant – enfant de pêcheurs ? Beaucoup de Suédois d’Estonie étaient aussi pêcheurs… – à qui l’on doit donner le plus d’importance ? Son âge, sa bonne santé, son sourire – du moins sur cette œuvre – en faisant quelque symbole de bonheur, de prospérité, étant un reflet de l’optimisme d’une communauté.
Y a-t-il quelque chose à rapprocher de quelque conte maritime ?
Une autre explication encore ?
Optimisme ? La sculpture, toujours là, a été installée en 1936. À cette époque, les cieux commençaient à sérieusement s’assombrir pour les Esto-Suédois.
Dans un premier temps de son indépendance, la République d’Estonie avait alloué aux minorités (Russes, Allemands, Suédois, Juifs…) une certaine autonomie (pages 20 – 25 de mon livre).
Possibilité de publier, d’ouvrir des écoles, des associations, d’utiliser leur langue avec l’administration dans les communes où ils étaient majoritaires… Les Esto-Suédois vont ainsi partager un représentant au parlement avec les Germano-Baltes. Aussi, une réorganisation des terres leur permet de bénéficier de petites fermes. Le point d’orgue de cette époque est sans doute la création du lycée suédois de Hapsal.
Je reparlerai aussi de ce qui se passait de l’autre côté du Golfe, où la minorité suédoise, en Finlande, était beaucoup plus importante. Il y a eu d’ailleurs des relations étroites entre le deux minorités, notamment dans le domaine de l’éducation.
Mais ensuite, un raidissement national de l’Estonie, du fait notamment de sa situation précaire entre les deux totalitarismes, entraîne une série de mesures vexatoires à l’encontre des minorités, notamment linguistiques. On parle d’« estonisation » – mot qui n’a rien à voir avec la « finlandisation » dont on entend parler ces jours-ci, à propos de débats sur la neutralité de la Finlande et de la Suède (voire de l’Ukraine).
Un numéro de juin 1936 de Kustbon (l’ « organe pour les Suédois en estonie ») est particulièrement révélateur de cette période, et de l’état d’esprit pacifique des Esto-Suédois, essayant de s’adapter aux nouvelles contraintes, fêtant en même temps les premiers diplômés du lycée.
On remarque que le journal emploie les noms estoniens (Haapsalu pour Hapsal), comme le leur impose l’« estonisation » nationale…
Mais peut-être est-ce simplement un hasard si c’est un garçon avec un poisson qui a été choisi pour orner le marché suédois.
Très récemment, sortant du « NHC », le nouvel hôpital civil de Strasbourg (la section ophtalmologie), j’en ai vu un autre, d’enfant au poisson.
Étrange clin d’œil.
Nils Blanchard
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