mardi 5 avril 2022

De la propagande… Sovjet-Estland

À la suite du dernier billet sur la revue 84, je peux tirer une autre publication de ma poche, tout aussi étrange, mais bien différemment : Sovjet-Estland, suédophone.


Elle tenta de remplacer auprès des Esto-Suédois (mais ses axes d’édition, son « marché potentiel », comme on dirait peut-être de nos jours, étaient tellement improbables…) une autre publication : Kustbon (qui existe toujours à Stockholm). On en reparlera, là encore…
Avec 43 numéros, généralement sur 4 pages, d’octobre 1940 à août 1941, elle a couvert une grande partie de la « Première occupation » qu’a connue d’Estonie – et notamment les zones esto-suédoises – par les Soviétiques.
Par leur propagande, et cette revue notamment, les envahisseurs soviétiques tentèrent de transformer les Esto-Suédois en une vitrine à destination des opinions occidentales, en premier lieu la Suède. Cette tentative s’est heurtée à l’incompatibilité foncière entre le projet soviétique et la quasi-totalité des Suédois d’Estonie, qui avaient plusieurs griefs contre l’occupant de l’Est.
D'abord, certaines zones côtières ou insulaires habitées par les Suédois d’Estonie ont été évacuées par les forces soviétiques à des fins stratégiques et militaires. Puis on remettait en cause leur mode de vie, en les privant de leurs domaines agricoles. Cela était aggravé par le quasi anéantissement de leur autre activité qui était la pêche, la navigation étant sévèrement limitée par les autorités d’occupation. Enfin, la soviétisation allait à l’encontre de la mentalité, la culture, de la petite communauté esto-suédoise (attachée à la religion, traditionnelle et résolument autonome).

(N. Blanchard, Elmar Krusman, L’Harmattan, 2021)

Ainsi, après une « première occupation » soviétique de l’Estonie (juin 1940 – été 1941), les Suédois d’Estonie, sous la « Deuxième occupation » (nazie), ont profité d’opportunités diverses pour quitter en masse leur pays, subodorant peut-être qu’une « Troisième occupation », soviétique à nouveau celle-là, succéderait à celle des Allemands propulsés par le plan Barbarossa. Les neuf dixièmes d’entre eux sont partis, en grande majorité vers la Suède.

J'ai eu l’occasion (et l’honneur, et le plaisir…) d’évoquer l’histoire de la revue dans le fort bel amphithéâtre de l’Inalco, lors du IVème Congrès de l’APEN.

On a accès aux numéros de cette revue grâce au site de Glenn Eric Kranking, qui a fait un de très intéressants travaux sur ce sujet. (Gustavus Adolphus College (Minnesota).)

Sovjet Estland est une mine d’article d’une propagande plus ou moins habile, naïve, mâtinée d’informations pratiques (sur des événements culturels, certaines évolutions législatives concernant par exemple la pêche…) Le suivi de l’actualité internationale y est souvent abracadabrantesque (mais sans la dimension poétique, rimbaldienne, que cet adjectif contient...) On y reviendra !

Bon, mais il se trouve que pour peaufiner mon intervention à ce congrès, je passai quelques jours cet automne dans le Bohuslän. Aux antipodes de ce printemps de guerre.

NB

NB

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À suivre...


Nils Blanchard


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