mercredi 11 mai 2022

Haslach, première approche

Mon intention n’est pas de passer en revue tous les camps annexes du KL Natzweiler. Je suis allé visiter néanmoins le site de cet ancien camp, récemment, en tout cas une partie (Vulkan). Maurice Vissà y a été interné.
 
Monument sur le site Vulkan - NB

Situé en Forêt-Noire, à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest de Strasbourg, c’était un petit camp, mais très meurtrier. 1736 déportés y sont passés sur une période comparable à l’existence du KZ Bisingen (septembre 1944 – avril 1945).

Pour y aller, traversée de petites villes allemandes sympathiques, encore bien industrialisées.

J'écrivais dans mon bouquin (le site de l’usine de Bisingen est occupé aujourd’hui par un terrain de sport ; et en arrivant à Haslach, je suis tombé sur un match de foot et un des sites – voir plus loin – s’appelle « Sportplatz ») : « Et on se demande aujourd'hui, dans ce lieu bucolique, où, tout près, ont lieu régulièrement des manifestations sportives sur le stade aménagé à l'emplacement de l'ancienne usine, comment a pu exister à cet endroit un tel édifice de malheur et de honte. »

C'est l’anachronisme du chercheur pris dans son récit, circonspect, aussi, devant certaines évolutions dans son propre pays.

Sur la route d’arrivée au site - NB


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Sur cette dernière photo, on approche après une petite marche bien balisée le site de l’ancienne mine et de son mémorial, dont on distingue les panneaux, comme en attente du visiteur. Sentiment un peu difficile à définir.
Petite « déception » (comment dire?) cependant, sur ce site Vulkan : il y a beaucoup de panneaux d’information (mais en verre réfléchissant le beau soleil, et ayant pris beaucoup de poussières… pas très lisible), certes, mais exclusivement en allemand, langue que je ne maîtrise que bien moyennement. (Seul un panneau de réclame pour je ne sais quel programme européen est en trois langues : allemand, français et anglais).

Pourtant, beaucoup de nationalités – une vingtaine – sont passées par ce camp, et encore la liste ne concerne que les déportés identifiés (740 sur les 1736, 220 parmi les morts – dont il y eut plusieurs centaines...)

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Mais précisément, de quel camp parle-t-on ?
Trois petits camps, en réalité, dont les déportés ont travaillé à l’aménagement des usines souterraines Daimler, dans des conditions effroyables.

– Le camp Arbeitslager Barbe, connu aujourd’hui sous le nom de « Sportplatz », est une annexe du Kl Natzweiler (les deux autres n’en sont pas...) 400 déportés dont deux-tiers de Français sont placés en septembre 1944 dans d’anciens hangars de la Wehrmacht. S’y rajoutent en décembre 248 déportés du KL Flossenbürg.

– En décembre 1944 arrivent 650 déportés (200 résistants, 100 Alsaciens venus du camp de redressement de Schirmeck, 350 prisonniers de guerre soviétiques) qui logeront dans les galeries de l’ancienne mine, dans des conditions atroces ; on parle du « Höllenlager Vulkan » (Camp de l’enfer Vulkan).

– En décembre 1944 toujours, 300 déportés arrivent et sont logés un peu plus loin (au bord de la rivière Kinzig) dans ce qui va être un troisième camp : Kinzigdamm. Ceux-là, comme les prisonners de Sportplatz, allaient chaque jour aux mines Vulkan pour y travailler.

D'autres déportés arriveront encore au moins jusqu’en février 1945.

Ils ont vécu, aussi, dans des conditions inhumaines, certains ne quittant guère les galeries humides.
Encore une fois : impossible de dresser un bilan précis.

Sources : site Lieux insolites, 16 mai 2016.



 Sur l’ancien site de la mine - NB


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Entrée de l’ancienne mine - NB

Je parlais de « déception », quant à l’usage unique de l’allemand sur le site. C’est peut-être aussi un parti pris : l’étude – et son partage – de l’histoire du nazisme et de ses horreurs étant considérée, peut-être, comme une affaire allemande avant tout. (Pas, simplement, un « mémorialisme » international un peu béat dont on nous rebat les oreilles…) Et force est de constater que cette affaire n’est pas négligée en Allemagne. On le voit, entre autres, à la multiplication des mémoriaux (Gedenkstätten), parfois modestes peut-être, mais sérieux pour ceux que j’ai vus.


Plaque du mémorial à Vulkan ; Roman Herzog (ancien président allemand) : « On n’est pas seulement responsable de ce que l’on fait, mais aussi de ce qu’on laisse faire. »
Peut-être R. Herzog avait-il lu John Stuart Mill : Bad men need nothing more to compass their ends, than that good men should look on and do nothing.”

Pour Haslach plus précisément (mais je viendrai peut-être à parler d’autres camps comparables en ce sens de la nébuleuse Natzweiler, comme celui de Katzbach à Francfort), quatre caractéristiques qui rejoignent celles de Bisingen où a été détenu Elmar Krusman :

– taille modeste du camp annexe,

– construction et développement à la toute fin de la guerre,

– mortalité très importante, concernant des déportés souvent au terme d’un long chemin de croix,

– présence à proximité d’agglomérations (et tentatives d’aide signalée dans des témoignages d’une partie de la population locale)…

Quatre champs universitaires, aussi, à explorer !

En repartant - NB

Nils Blanchard


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